CONSIDÉRATIONS SUR LE CARACTÈRE DU

MOUVEMENT RELIGIEUX DU JOUR [1849]

 

ET SUR LES VÉRITÉS PAR LESQUELLES

LE SAINT-ESPRIT AGIT POUR LE BIEN DE L’ÉGLISE.

 

John Nelson Darby

 

Éd. Georges Kaufmann, Genève 1849

[Les textes entre crochets ont été ajoutés par Bibliquest]

 

Table des matières abrégée (détaillée) :

1       Chapitre 1 – [Éclatement des anciennes structures religieuses et politiques. Formation d’églises libres. Foi et Providence]

2       Chapitre 2 – [Tranquillité hors de l’église-monde, mais nécessité de s’intéresser à ses frères, qu’ils soient sortis tôt ou tard — Démêler ce qui est de Dieu dans les mouvements religieux nouveaux]

3       Chapitre 3 – [Les témoignages provenant de Dieu ne tirent pas leur existence ni leur force des circonstances du moment]

4       Chapitre 4 – [Suivre des mouvements politiques régionaux ou être à la hauteur du témoignage de Dieu ?]

5       Chapitre 5 – [La ‘constitution de l’église évangélique de Genève’]

6       Chapitre 6 – [L’Église constituée en un seul corps sur la terre, et la présence du Saint Esprit en est la source et la force]

7       Chapitre 7 — [Suite de « La constitution de l’église évangélique de Genève »]

8       Chapitre 8 – [Vérités capitales pour le temps actuel]

9       Chapitre 9 – [Peut-on baser une église sur une constitution ? Revenir aux vérités de la Réformation ne suffit pas]

 

 

Table des matières détaillée (abrégée) :

1       Chapitre 1 – [Éclatement des anciennes structures religieuses et politiques. Formation d’églises libres. Foi et Providence]

1.1     [Bouleversements dans les églises. Écroulement du respect en général]

1.2     [Naissance des églises libres au milieu des troubles politiques]

1.3     [Des hommes secouent les jougs religieux. Certains poussés par leur conscience et leur foi, veulent former une église qui réponde aux besoins]

2       Chapitre 2 – [Tranquillité hors de l’église-monde, mais nécessité de s’intéresser à ses frères, qu’ils soient sortis tôt ou tard — Démêler ce qui est de Dieu dans les mouvements religieux nouveaux]

2.1     [Tranquillité de ceux qui suivent la Parole de Dieu à travers les bouleversements du monde]

2.2     §  [Il semble suffire de s’en tenir à cette tranquillité, malgré le mépris environnant]

2.3     § [Objections à ce chemin de tranquillité :]

2.3.1      [Difficulté du temps]

2.3.2      § [Lutter pour l’unité pour avoir de la force ? cela cache probablement un manque de foi. On sent le besoin de séparation, mais on le craint par manque de foi]

2.3.3      § [La lenteur de conscience provoque beaucoup de retard pour se séparer des systèmes ; néanmoins il faut s’intéresser aux autres et accueillir les tardifs]

2.3.4      § [Besoin de démêler ce qui est produit par l’Esprit de Dieu et ce qui a été impulsé par les révolutions politiques pour détacher les croyants de l’église-monde]

3       Chapitre 3 – [Les témoignages provenant de Dieu ne tirent pas leur existence ni leur force des circonstances du moment]

3.1     § [Fidélité de Dieu conduisant le peuple malgré son incrédulité, nourrissant la foi et maintenant le courage de quelques-uns]

3.2     § [Jésus homme sur la terre a révélé Dieu au milieu des circonstances sans que celles-ci faussent le caractère de son témoignage]

3.3     § [Dieu met une porte ouverte, que personne ne fermera, devant ceux qui gardent Sa Parole et ne renient pas Son Nom. La force du témoignage ne vient pas des circonstances]

3.4     § [Le témoignage des apôtres venait de Dieu, sans mélange. C’est ce dont a besoin l’Église mélangée au monde. Le point de départ de ce témoignage ne vient jamais du mouvement du monde]

3.5     § [La Réformation n’a pas été une révélation nouvelle. Dieu s’est servi des circonstances, mais dans sa cause, dans son origine et dans son énergie, l’œuvre a été exclusivement intérieure et divine]

3.6     [Ne pas apprécier la Réformation, c’est mépriser l’œuvre de Dieu. En faire la mesure de la vérité, c’est méconnaître le christianisme qu’on trouve dans la Parole]

4       Chapitre 4 – [Suivre des mouvements politiques régionaux ou être à la hauteur du témoignage de Dieu ?]

4.1     [La Réformation n’a pas été un rétablissement intégral du christianisme]

4.2     § [La ligne de conduite est à tirer de la Bible et non de ce qui a été fait à la Réformation, qui est pourtant une œuvre admirable de l’Esprit de Dieu]

4.3     § [À la Réformation, Dieu a mis en relief les vérités nécessaires à l’Église à l’époque. Reconnaître aujourd’hui l’œuvre de Dieu et d’autres vérités puissantes mises à jour]

4.3.1      [La Parole parfaite contient des vérités et des lumières nécessaires pour les temps difficiles d’aujourd’hui]

4.3.2      [Un témoignage né des circonstances revêt plus ou moins le caractère qu’elles lui impriment]

4.4     § [Le témoignage de Dieu rabaissé par le fait que les églises libres sont issues des mouvements politiques du jour (révolutions)]

4.5     § [Reproche de schismes faits à ceux qui ne se joignent pas aux assemblées constituantes des nouvelles églises par motif de conscience à l’égard de la Parole de Dieu]

5       Chapitre 5 – [La ‘constitution de l’église évangélique de Genève’]

5.1     [Les promoteurs de la ‘constitution’ accusent de schisme ceux qui n’adhèrent pas]

5.2     [La ‘constitution’ n’a pas de racines assez profondes dans la vérité de Dieu]

5.3     [Le résultat sera d’attirer et réunir quelques âmes, mais l’œuvre de Dieu désirée ne sera pas faite]

5.4     § [L’idée de l’Église (l’idée de ce qu’est vraiment l’Église sur la terre selon la Parole) manque]

5.5     § [Les vérités sur l’Église et sur la venue du Seigneur ne manquent pas seulement dans la ‘constitution’, mais partout. Leur importance est vitale pour le salut et la marche]

5.6     § [Un adversaire nie que l’Église soit un corps, et que les églises forment un corps unique, responsable, ayant une destinée commune]

5.7     § [Un autre adversaire argumente que « les églises diverses n’ont jamais été réunies en une seule assemblée » et que l’Église est formée de « la totalité des croyants dans toute la suite des âges »]

5.8     § [La ‘constitution’ tient l’idée d’un corps invisible qui ne sera manifesté qu’au dernier jour, et que les églises particulières comprennent des non-régénérés]

5.9     § [Constitution vaudoise : les églises vaudoises sont vues comme un corps, une église, l’épouse de Christ]

5.10       § [Les idées précitées font qu’on ne cherche même pas une unité, on en reste à des mouvements nationaux]

5.11       [Église invisible : quelques arguments pour et contre. Cette notion remonte à St Augustin]

5.12       [Ce qu’enseigne la Parole de Dieu sur l’Église]

5.12.1        [Église sur la terre, responsable de la manifestation de la gloire de Jésus et de l’amour du Père, un corps agissant par ses membres]

5.12.2        [Église : distinguer le corps sur la terre avec le Saint Esprit, et l’état céleste en gloire. Position de responsabilité à l’égard de ce qui sera accompli plus tard par puissance]

6       Chapitre 6 – [L’Église constituée en un seul corps sur la terre, et la présence du Saint Esprit en est la source et la force]

6.1     [Ce qu’en disent plusieurs passages de la Parole de Dieu :]

6.1.1      [Éphésiens 1]

6.1.2      [Éphésiens 2]

6.1.3      [Éphésiens 3]

6.1.4      1 Corinthiens 12]

6.2     § [Échec du témoignage rendu par l’Église à la gloire de Christ. Elle sera enlevée et manifestée en gloire, mais retranchée quant au service sur la terre, et une autre économie la remplacera]

6.3     § [Les systèmes d’églises libres et de dissidence méconnaissent l’idée que la Parole donne de l’Église (malgré du bien produit grâce à de la fidélité). Le fondement qu’on pose nie celui posé par Christ]

7       Chapitre 7 — [Suite de « La constitution de l’église évangélique de Genève »]

7.1     [La ‘Constitution’ : Le sacerdoce universel est bridé par un ministère constitué d’Anciens officiellement établis]

7.2     § [Exiger imposition des mains et études de théologie pour qu’un ministère soit reconnu, c’est refaire un clergé et nier l’autorité et les dons de Christ]

7.3     § [Discipline]

7.3.1      [Sous prétexte de « concilier l’unité dans la foi avec la variété dans la forme », on impose des règles qui nient l’unité de l’Église de Christ]

7.3.2      [Au-delà des conseils et de la répréhension fraternelle, la discipline ultime est exercée par un « presbytère » = conseil d’Anciens : c’est encore refaire un clergé]

7.4     § [‘Constitution’ ou ‘profession de foi’ obtenues par concessions mutuelles : le témoignage est réduit au niveau le plus bas, la vérité est tronquée, l’Esprit est contristé]

7.5     § [Pas de témoignage possible quand on fait un compromis habile sur la venue du Seigneur et le jugement des vivants, pour satisfaire à la fois ceux qui y croient et ceux qui n’y croient pas]

7.6     § [Il n’y a pas à produire l’union, mais à la reconnaître dans l’unité du corps de Christ. Chercher un moyen d’union en s’accordant sur une confession de foi commune est une faute]

8       Chapitre 8 – [Vérités capitales pour le temps actuel]

8.1     [Vérités de base du christianisme]

8.1.1      [Vérités de base admises même par la théologie romaine]

8.1.2      [Vérités concernant les relations de l’homme pécheur avec son Dieu. L’œuvre de Christ médiateur]

8.2     (1)§  [Vérité en rapport avec Christ manifesté dans l’œuvre de la croix]

8.2.1      [L’appropriation de l’œuvre de Christ est entièrement perdue pour le système catholico-romain]

8.2.2      [La Réformation a fait briller le témoignage de la grâce de Dieu]

8.2.3      [La Réformation a fait reposer l’assurance du pécheur quant à la grâce de Dieu sur le témoignage de Dieu, sur Sa Parole]

8.2.4      [Au travers des bouleversements du temps, le Seigneur parle par sa Parole et veut faire connaître des vérités supplémentaires à celles de la Réformation]

8.2.5      [Le Seigneur parle de son Église et de son retour]

8.3     (2)§  [Vérités en rapport avec Christ à la droite de Dieu (et le Saint Esprit ici-bas)

8.3.1      [Christ, à la droite de Dieu, rassemble l’Église sur la terre par le Saint-Esprit qu’il a envoyé d’en haut]

8.3.2      [La Réformation a développé des Églises nationales, groupées géographiquement]

8.3.3      [La bonne référence est la Parole de Dieu. La Réformation se caractérisait par l’obéissance à cette Parole]

8.3.4      [Les révolutions ont produit les églises libres. Les règlements humains et les restrictions géographiques s’opposent à l’unité du corps de Christ formée par le Saint Esprit]

8.3.5      [L’Église, corps de Christ : un témoignage de la puissance de la rédemption + de la présence du Saint-Esprit + de la gloire de Christ sur le trône du Père + Elle est la demeure de Dieu sur la terre, l’épouse de Christ]

8.3.6      [Une partie importante de la vie chrétienne et de l’amour de Jésus se rattache à la vérité au sujet de l’Église]

8.3.7      [S’occuper de ce que Dieu a créé l’Église pour être cohéritière de son Fils, épouse de l’Agneau, dans la gloire. Mais son rassemblement s’opère sur la terre par le Saint-Esprit descendu du ciel et elle est une avec Christ en haut]

8.4     (3)§  [Troisième vérité dont parle la Parole et laissée de côté par la Réformation : Le retour du Seigneur]

8.4.1      [Le retour du Seigneur, une vérité qui doit agir puissamment sur la conscience et sur le cœur, et non une vérité lointaine étrangère à la vie de chaque jour]

8.4.1.1      [La venue du Seigneur, un motif continuel pour produire du sérieux dans les âmes du monde (jugement des vivants)]

8.4.1.2      [La venue du Seigneur, un motif continuel pour la marche du croyant (conversion, joie, communion, sainteté, consolation pour deuil, etc.)]

8.4.2      [Effets mauvais et graves de l’oubli du retour du Seigneur]

8.4.3      [La venue du Seigneur : Une vérité qui fait vibrer le cœur]

8.4.4      [En bref : Venue du Seigneur : menace pour le monde, elle se lie à toutes les pensées, les affections, les motifs des fidèles. Cette vérité se lie à toute la vie chrétienne]

8.5     [Conclusion : les deux vérités de l’Église corps formé par le Saint Esprit et du retour de Jésus, méconnues par la Réformation, sont essentielles à la gloire de Jésus et à l’instruction de l’Église dans ses circonstances]

9       Chapitre 9 – [Peut-on baser une église sur une constitution ? Revenir aux vérités de la Réformation ne suffit pas]

9.1     [La situation est qu’on cherche des solutions de remplacement aux institutions de la Réformation qui s’en vont]

9.2     [Peut-on rallier les enfants de Dieu par une profession de foi basée sur la négation de l’erreur ?]

9.3     [Une église de multitude est forcément indifférente à l’erreur. Nier l’erreur ne suffit pas à rassembler]

9.4     [Besoin de l’énergie de l’Esprit de Dieu. Agir hâtivement sans changer les institutions qu’on abandonne et sans se différencier franchement quant à la doctrine, ne suffit pas à retenir les âmes]

9.5     [La séparation, pas plus que l’affection pour la tradition, ne suffisent pas à rallier tous les enfants de Dieu par une obligation spirituelle. Il faut des vérités positives pour rassembler]

9.6     [Vouloir être à la hauteur des pensées de Dieu, est-ce une prétention orgueilleuse ou la simplicité de la foi ? Est-ce faire de l’opposition à une bonne ‘constitution’ ?]

9.7     [Ne pas faire une église en se fondant sur une constitution, mais agir avec foi d’après un principe qui embrasse toute l’Église de Dieu]

 

1         Chapitre 1 – [Éclatement des anciennes structures religieuses et politiques. Formation d’églises libres. Foi et Providence]

1.1        [Bouleversements dans les églises. Écroulement du respect en général]

Qu’il y ait un mouvement universel au sujet de la position de l’Église de Dieu, mouvement qui rompt bien des chaînes et renverse bien des idées, c’est là un fait patent. Le monde même s’en occupe. Les liens qui unissent avec l’état les corps ordinairement appelés églises, vieillissent avec les formes de la société où ils ont pris naissance. Le lierre tombe avec l’édifice qui croule.

En tout cela, le chrétien est appelé à séparer le bien d’avec le mal. Tous ces mouvements se rattachent aux innovations qui ont lieu dans la vieille société de l’Europe, aux révolutions qui ont détruit le respect, ou qui, plutôt, manifestent la destruction du respect pour la tradition des pères, respect qui soutenait en même temps et la société et la religion de la patrie. Bien qu’auparavant quelques objections s’élevassent contre tel ou tel détail, on sentait néanmoins qu’il s’agissait de la patrie et de l’église de ses ancêtres. Le fait qu’une chose est ancienne ne suffit plus pour lui assurer le respect.

 

1.2        [Naissance des églises libres au milieu des troubles politiques]

Le mouvement écossais a eu ce caractère non moins que les autres, quoique d’une manière moins évidente. Il a participé au caractère modéré de la révolution sociale dans la Grande-Bretagne ; mais il n’en a pas moins été un mouvement populaire contre l’influence aristocratique (*).

 

(*) Influence qui, dans ce moment, s’éloigne toujours plus du presbytérianisme, et s’attache toujours plus au système épiscopal, comme en Angleterre au Puséysme.

 

Les autres églises libres ont évidemment pris naissance dans les troubles politiques des pays auxquels elles appartiennent.

N’y avait-il donc pas un mouvement des consciences en ce qui a produit l’église libre d’Écosse ? — Oui, assurément. La question du patronage avait agité l’Écosse depuis un siècle au moins. En d’autres pays, la conscience d’un grand nombre de personnes, ministres et laïques, avait été travaillée par le mélange du monde et de l’Église, ou poussée à se séparer par d’autres raisons ; mais ces difficultés n’avaient jamais produit des églises libres. La conscience agissait individuellement. Quelques-uns s’entendaient peut-être et agissaient en commun. On vit se former une sécession, une dissidence, une école de théologie ou quelque chose de pareil. La conscience individuelle, et une certaine activité spirituelle, affranchie du joug, prenaient leur essor ; le corps, encore intact, des nationaux persévérait à juger cela comme une irrégularité, et le persécutait parfois.

 

1.3        [Des hommes secouent les jougs religieux. Certains poussés par leur conscience et leur foi, veulent former une église qui réponde aux besoins]

Les choses n’en sont plus là. Tout est mis en question. Les liens qui réunissaient l’ensemble en un faisceau sont relâchés. L’idée de liberté a affaibli les droits de l’église que soutenait l’état. Ce n’est plus seulement la conscience des hommes spirituels qui, par la foi, se fraie un chemin à travers des difficultés personnelles, suscitées par une société qu’ils respectent. C’est un principe qui se pose comme le seul principe religieux qui maintienne les droits de la conscience et de Christ, et qui, comme tel, se déclare en droit d’occuper la scène du monde. La providence de Dieu y entre pour beaucoup. C’est une considération importante pour la foi et pour la conscience. On veut former l’Église selon Christ. On voit des hommes, depuis longtemps gênés dans leur conscience, et poussés maintenant par des circonstances providentielles, secouer le joug d’une influence étrangère, et agir avec foi dans le but de former une église qui réponde aux besoins du moment, tels qu’ils les entendent, et aux idées qu’ils se sont faites de ce que l’Église devrait être.

 

2         Chapitre 2 – [Tranquillité hors de l’église-monde, mais nécessité de s’intéresser à ses frères, qu’ils soient sortis tôt ou tard — Démêler ce qui est de Dieu dans les mouvements religieux nouveaux]

2.1        [Tranquillité de ceux qui suivent la Parole de Dieu à travers les bouleversements du monde]

Ici surgit une question importante. Est-ce le devoir de tous de s’y joindre ? Est-ce dans ce chemin que l’Esprit de Dieu conduit le chrétien ?

Le cœur salue la foi et la fidélité à la conscience qui s’y trouvent. Toutefois, les frères qui, depuis des années, ont marché en dehors du monde religieux, n’auraient, quant à leur position à eux, pas besoin d’y penser. Il y a des années qu’ils ont pris une position, et ils la croient conforme à la vraie intelligence de la Parole. C’est lorsque tout était encore tranquille qu’ils ont étudié cette Parole, et que Dieu leur a montré, ils en sont convaincus, le chemin qu’il faut suivre. Ils y ont trouvé la bénédiction et l’approbation de Dieu, tout en faisant l’expérience de leur faiblesse, et de toutes sortes d’infirmités qui s’attachaient à leur peu de foi, mais en voyant d’autant plus, au milieu de tout cela, que Dieu gardait l’œuvre et, toute chétive qu’elle était, agissait par elle dans la conscience des siens, et pour la conversion des pécheurs. Ils avaient même prévu tout le bouleversement qui est survenu, de sorte qu’il ne les a ni surpris, ni effrayés. Participants d’un royaume qui ne s’ébranle pas, ils attendaient en paix et avec joie la venue de Jésus. Les révolutions qui ont eu lieu les ont confirmés dans leurs convictions et dans leurs pensées, sans ébranler leur confiance et leur joie. L’abri d’une foi qui explique toutes ces choses, et qui comprend d’autant mieux que rien de ce qu’elle possède n’en est atteint, et une position qui leur épargne l’excitation qui s’empare des hommes préoccupés des circonstances du moment, et fait dépendre, à leurs yeux, l’état et les devoirs de l’Église des mouvements d’un monde, où la tranquillité est recherchée avec ardeur parce qu’elle n’existe nulle part, et où elle sera recherchée en vain de ceux qui la veulent ici-bas, jusqu’à ce que le Prince de Paix vienne l’établir, quoique, pour un moment, Dieu puisse retenir les flots. Je le répète, les frères dont je parle trouvent plus de motifs que jamais à la paix et à une marche retirée et tranquille, dans la voie qui leur a été tracée. Un abri assuré est d’autant plus apprécié lorsque l’orage éclate, quoique rien ne soit changé dans l’abri en lui-même, et même parce qu’il n’est pas changé. Pour eux, leur chemin, chemin pénible pour la foi au commencement, mais jalonné maintenant de tant de bénédictions, a plus de charmes, plus d’attraits que jamais ; ils ont plus que jamais des motifs de le suivre.

 

2.2        §  [Il semble suffire de s’en tenir à cette tranquillité, malgré le mépris environnant]

Si l’on s’arrêtait là, tout serait simple. Tenez-vous tranquilles, voilà tout ce qu’il y aurait à dire. Demeurez dans le chemin où les souvenirs d’un Dieu de bonté vous reviennent, et où la bonté d’un Dieu qui vous dirige vous a placés ; chemin que vous avez trouvé dans la Parole, et que vous avez trouvé en paix, et toutefois avec un cœur surchargé d’angoisse pour l’Église, au milieu du mépris de frères, qui se glorifiaient alors d’une position que maintenant ils décrient avec la même force ; de frères qui trouvent le seul lien d’union dans ce en quoi ils ne voyaient que schisme, il y a quelques jours. Pourquoi vous occuper d’autres choses que d’être fidèles à ce que Dieu vous a enseigné ?

 

2.3        § [Objections à ce chemin de tranquillité :]

Mais voici des considérations qu’on nous présente.

 

2.3.1        [Difficulté du temps]

[Objection :] Les difficultés des temps sont grandes.

[Réponse :] Cela est vrai. Mais la foi, affermie dans un chemin connu, ne s’effraie pas devant elles, comme ceux qui, au sortir d’un système où ils avaient vécu, trouvent tout nouveau pour leur foi individuelle, et se sentent en même temps appelés à fonder un système.

 

2.3.2        § [Lutter pour l’unité pour avoir de la force ? cela cache probablement un manque de foi. On sent le besoin de séparation, mais on le craint par manque de foi]

[Objection :] Mais, dites-vous, les difficultés sont grandes. L’unité est réclamée comme le seul moyen de force contre les flots qui montent. C’est un devoir. Vous devez penser à toute l’Église, et non pas seulement à votre paix à vous. Si vous ne le faites pas, vous ne pourrez être bénis. Soyons un pour le bien et pour la force de tous.

[Réponse :] Je réponds à cela que, comme seul moyen de force, l’unité ne m’inspire pas une confiance sans réserve. Je crains un peu que, tout en revêtant le caractère du désir de l’unité, ce ne soit un manque de foi à l’égard du Chef, qui recherche si fort l’appui des membres. La conscience de nos frères a longtemps senti le mal ; mais l’importance qu’avaient à leurs yeux ceux qui faisaient partie du même système qu’eux, mais qui n’avaient aucune force de la part de Christ, chef de sa Maison, les empêchait de se séparer d’eux, et subsiste encore dans leur pensée. Ces frères craignaient alors de se séparer d’eux, à cause de l’importance que leur propre manque de foi leur prêtait. Ils les craignent dans cette même mesure encore, et cela d’autant plus que la conscience et la foi s’affaiblissent par des hésitations et des délais, et s’énervent par l’acceptation de choses qu’elles condamnent. Nous savons jusqu’à quel point des influences si délétères ont conduit quelques frères, d’ailleurs respectés de tous. « Ne dites pas confédération à tout ce à quoi ce peuple dit confédération. Ne craignez pas ce qu’il craint, et ne répandez pas l’effroi ; mais sanctifiez l’Éternel des armées lui-même, et qu’Il soit votre crainte et votre frayeur ; et Il vous sera un sanctuaire » (És. 8:12-14). Voilà ce qui revient à l’esprit du croyant à l’ouïe de ces cris d’union, que font entendre ceux qui sortent de dessous le joug sous lequel ils ont si longtemps courbé le dos.

 

2.3.3        § [La lenteur de conscience provoque beaucoup de retard pour se séparer des systèmes ; néanmoins il faut s’intéresser aux autres et accueillir les tardifs]

Mais, lorsqu’on nous dit : Vous devez vous intéresser à tous vos frères, et ne pas vous borner à chercher votre propre paix et vos intérêts particuliers, ceci a prise sur la conscience et sur le cœur, et nous sommes tenus, devant Dieu, à peser ce que cet appel demande de nous.

Quel est le caractère, quelle est la force de ce mouvement aux yeux de Dieu ? Quels sont ses droits sur notre jugement spirituel ? Quant à l’homme, il y a du bien, il y a de la conscience. Quant à Dieu, sa main s’est montrée dans les circonstances. Jusqu’à quel point son Esprit se montre-t-il dans ce mouvement même ?

La lenteur de la conscience dans ces choses ne me porte pas à adresser le moindre reproche quelconque à nos chers frères qui y ont participé. On se réjouit de tout son cœur de ce que Dieu les a délivrés. Le cœur du chrétien s’avance cordialement vers eux. Ils conviendront, de leur côté, qu’il s’agit de notre responsabilité envers Dieu ; qu’il s’agit de la marche qui le glorifiera le plus. Or, la lenteur de la conscience, cette faiblesse qui a empêché la conscience d’agir pendant de longues années de convictions, durant lesquelles ces chers frères ont appuyé ce qu’ils savaient être mauvais, et ont même condamné ceux qui se sont séparés de leur système et de leur marche ; et joignez à cela le fait que les circonstances ont amené la conclusion à laquelle ils sont eux-mêmes arrivés ; cette lenteur de la conscience empêche que son activité d’aujourd’hui n’exerce autant de puissance pour former notre jugement, quant à la marche que nous avons à suivre devant Dieu, nous qui marchions déjà en dehors de ce qu’ils viennent de quitter. Cela empêche-t-il que notre cœur ne soit ouvert, cordialement ouvert à ces frères, qu’il ne les accueille et qu’il ne veuille les fortifier par ses prières, de même que par un intérêt sincère et manifeste aux yeux de tous ? Loin de là. Pour ma part (ma voix est très-faible), je vois la main de Dieu en ce qui se passe. Je vois la conscience dans mes frères. Cette voix voudrait les encourager comme mon cœur s’en réjouit.

 

2.3.4        § [Besoin de démêler ce qui est produit par l’Esprit de Dieu et ce qui a été impulsé par les révolutions politiques pour détacher les croyants de l’église-monde]

Le fait que la main de Dieu a agi, produit évidemment dans le cœur de celui qui regarde à Dieu du respect pour ce mouvement. Dieu y est, cela est évident. Cette action de sa Providence fait respecter ce qui se passe. Mais, jusqu’à un certain point, elle prive l’œuvre du caractère d’une œuvre de l’Esprit de Dieu. Je dis jusqu’à un certain point ; car je ne doute nullement que l’Esprit de Dieu n’agisse dans le cœur de ces frères ; et, je l’espère aussi, en d’autres non manifestés encore. Je comprends aussi que le fait de les avoir précédés en date est loin de tout dire. Il y en a des premiers qui seront les derniers, et des derniers qui seront des premiers. Je comprends que cela peut dire, de la part de Dieu, à ceux qui ont marché en dehors de l’église-monde : Si vous aviez été fidèles, si vous aviez eu la foi nécessaire pour faire valoir la Parole dans les âmes que j’avais préparées, je n’aurais pas eu besoin de susciter un nouveau témoignage. Je me soumets, je l’espère, de tout mon cœur à cet appel à ma conscience. Il est toujours bon d’écouter Dieu. Seulement faut-il que je pèse sérieusement ce qu’Il me dit, et que, dans le moyen qu’Il emploie, si ce moyen n’est pas directement la Parole, je sépare ce qui est de l’homme d’avec ce qui est de Dieu, « ce qui est précieux de ce qui est méprisable » (Jér. 15). Mes frères, j’en suis sûr, en conviendront. Sans cela, je me fourvoierais dans un chemin qui, tout en y apportant quelque chose de bon, ne répondrait pas à l’impulsion imprimée par Dieu lui-même ; et je perdrais peut-être beaucoup du témoignage qu’Il m’avait précédemment confié. Je répète donc que le caractère providentiel du mouvement actuel, l’impulsion qu’il a reçue des mouvements politiques du jour, le fait qu’il a même pris naissance dans ces mouvements, tout cela exige que je considère ce qui est de Dieu et ce qui n’en est pas. Ce n’est pas, je le répète aussi, que je n’y voie pas l’œuvre de l’Esprit de Dieu dans les cœurs. Ce n’est pas que j’attribue le mouvement religieux à l’esprit qui a produit le mouvement politique. Loin de là. Il est, néanmoins, patent que le mouvement religieux a été occasionné par le mouvement politique. Les consciences étaient mécontentes. Le Saint-Esprit avait fait naître des besoins dans les cœurs ; mais ni ce trouble des consciences, ni cette action de l’Esprit n’avaient enfanté ce qui se fait maintenant. Les révolutions sont survenues. Les liens, encore solides en apparence, se trouvaient pourris ou usés ; et ce que la conscience et l’œuvre de l’Esprit en elle n’ont pas amené, les circonstances l’ont accompli. L’Église ne s’était pas affranchie par la puissance de l’Esprit ; les révolutions l’ont affranchie. Béni soit Dieu, si sa bonté accomplit extérieurement ce que la foi de nos frères n’a pas pu saisir, ce que leur offrait sa main toujours étendue pour leur donner ce que sa voix, dans la Parole, leur révélait !

 

3         Chapitre 3 – [Les témoignages provenant de Dieu ne tirent pas leur existence ni leur force des circonstances du moment]

Il n’en a pas été ainsi lorsque Dieu a agi dans ses délivrances à Lui.

 

3.1        § [Fidélité de Dieu conduisant le peuple malgré son incrédulité, nourrissant la foi et maintenant le courage de quelques-uns]

Chassé par ses frères qui ne le comprenaient pas, Moïse a reçu de Dieu dans le buisson la verge de son autorité. Il part. Il retourne vers ses frères opprimés, et leur fait connaître le Dieu de leurs pères ; et il quitte l’Égypte, ne craignant pas la colère du roi, parce qu’il endurait ces choses comme voyant Celui qui est invisible, et ayant égard à la rémunération. Le peuple voit, en se tenant tranquille, la délivrance de Dieu lui-même, et ses ennemis sont engloutis dans les « eaux magnifiques ». À travers beaucoup d’incrédulité et malgré bien des murmures, c’est Dieu lui-même et sa nuée qui les ont conduits par le désert, où il n’y avait point de chemin, et où les serpents brûlants leur contestèrent le passage. Ce fut Dieu lui-même qui amena en Canaan ce peuple, hélas ! incrédule, lui faisant faire la découverte qu’au bout de tant de douleurs et de tant de dangers, le poil de leurs vêtements n’était pas usé, ni la plante de leurs pieds foulée. C’était la fidélité de Dieu qui nourrissait une foi toujours prête à s’éteindre, et qui maintenait le courage de quelques-uns en face de l’incrédulité de plusieurs.

« Bienheureux celui qui demeure dans ta maison ! »

Et bienheureux aussi celui dont le cœur est dans tes sentiers, dans les sentiers qui conduisent à ta maison, et qui, traversant la vallée de Baca, la réduisent en fontaine, et les mares sont remplies d’eau ! [Ps. 84].

 

3.2        § [Jésus homme sur la terre a révélé Dieu au milieu des circonstances sans que celles-ci faussent le caractère de son témoignage]

Et, lorsque le christianisme, ce don ineffable de Dieu, a été introduit dans ce monde, qu’avons-nous vu en Jésus, en cet homme qui n’a pas élevé sa voix dans les rues ? Un témoignage qui était sien, purement et profondément moral, que dis-je ? divin, au milieu d’un monde qui avait ses voies propres ; un témoignage, une vie, une personne qui ont introduit dans ce monde la lumière de Dieu lui-même, le soulagement, la clarté, la puissance moralement indépendante qui procédait de Lui, et cela, dans une humilité qui les faisait pénétrer en amour partout où un cœur brisé, dégradé peut-être aux yeux des hommes, en avait besoin ; une humilité qui frayait la route à un amour devant lequel rien ne se trouvait trop bas pour que Dieu y descendit en grâce. Oh, que ce pauvre monde en avait besoin ! Empruntait-Il quelque chose aux circonstances qui l’entouraient ? Le contraire a été le tout de sa vie. Il est venu au milieu de ces circonstances pour y révéler Dieu, parce que tout Lui était contraire, et que par conséquent tout était misérable, et Dieu en amour s’y rendait dans cette grâce qui surabonde là où le péché abonde. Jésus rencontrait-il le concours des circonstances ? Certes, non. « Son temps », c’était « lorsque l’homme était impie et sans force » [Rom. 5:6]. Cette œuvre a dû être l’œuvre de Dieu. Oh ! que nous sommes heureux d’avoir une œuvre qui soit une manifestation de Lui dans ce pauvre monde ! Dieu n’a-t-il pas fait concourir les circonstances ? Oui, tout concourt à sa manière ; non qu’Il arrange les circonstances pour fausser le caractère du témoignage, comme si ce témoignage n’était pas de Dieu, ou comme si l’homme ne lui était pas opposé. Quelle que fût la hauteur du mur que l’homme opposait à son entrée, à lui Jésus, le portier ouvrait et les brebis entendaient sa voix.

 

3.3        § [Dieu met une porte ouverte, que personne ne fermera, devant ceux qui gardent Sa Parole et ne renient pas Son Nom. La force du témoignage ne vient pas des circonstances]

Nous ne sommes pas Jésus. Non, mes frères, nous ne le sommes pas. Mais vous voudriez l’imiter, et Dieu est fidèle qui ne permettra pas que, nous soyons tentés au-delà de notre force. Voici ce que la Parole m’enseigne : « Parce que tu as un peu de force, que tu as gardé ma Parole, et que tu n’as point renié mon nom ». Et Celui qui ouvre et personne ne ferme, qui ferme et personne n’ouvre, que fait-Il pour ceux qui sont ainsi dépeints de sa part ? Il met devant eux une porte ouverte et personne ne la fermera. Ce donc à quoi je tiens, c’est à garder sa Parole, à ne pas renier son nom ; à garder sa Parole quelle que soit la faiblesse de la position dans laquelle je me trouve ; à maintenir pur, et tel qu’Il me l’a confié, le témoignage de son nom. C’est ce qu’Il appelle garder la parole de sa patience. Notre affaire est de garder le témoignage pur. Dieu l’accompagnera de sa puissance. Jésus était le témoin fidèle. Le portier lui ouvrait. Dieu, qui gouvernait tout, mettait le témoignage en relief par des circonstances contraires en apparence, mais dans lesquelles, en réalité, Il faisait tout concourir au plein effet de ce témoignage. Celui qui a toute puissance dans les cieux et sur la terre en fera de même. Si c’est sa Parole, la parole de sa patience, lors même que ce ne sera qu’avec un peu de force, Il ouvrira et personne ne fermera, et Il nous gardera même de l’heure de la tentation, qui va venir sur toute la terre habitable pour éprouver ceux qui HABITENT SUR LA TERRE. Vous savez le beau nom que portait l’Église à laquelle il adressait cette promesse.

Notre tâche est donc de garder sa Parole, de ne pas renier son nom, tout ce que son nom porte (car le nom de Jésus signifie ce qu’il est), de garder la parole de sa patience.

Le témoignage de Jésus ne tire donc ni sa force, ni son existence des circonstances du moment. Son prix consistait en ceci, qu’il était ce qu’il était en lui-même, venant de Dieu et lui rendant témoignage. Dieu prenait parfaitement soin de ce témoignage.

 

3.4        § [Le témoignage des apôtres venait de Dieu, sans mélange. C’est ce dont a besoin l’Église mélangée au monde. Le point de départ de ce témoignage ne vient jamais du mouvement du monde]

Examinons, maintenant le témoignage des Apôtres.

Ce témoignage a-t-il puisé son existence, a-t-il pris naissance dans les circonstances ? Non. Il venait directement de Dieu. Non-seulement cela est vrai de la doctrine ; cela n’est pas moins vrai du témoignage rendu à Christ lui-même. Soit d’une manière miraculeuse, soit par son énergie dans l’âme, l’Esprit de Dieu suscitait un témoignage qui puisait sa force et son caractère dans cette énergie même de l’Esprit ; ainsi, il introduisait et sans mélange, le témoignage de Dieu dans le monde. C’est ce dont le monde, c’est ce dont l’Église, avaient besoin. Ce témoignage n’en est pas moins le véritable, maintenant que l’Église est toute mélangée avec le monde, et en même temps plongée dans l’erreur.

La persécution extérieure agit en Judée pour étendre la sphère du témoignage. Par cette patience de grâce qui avait dit aux Apôtres de prêcher en son nom en commençant à Jérusalem, Jérusalem avait été un moment le centre du témoignage de Dieu ; mais, devenue hostile à l’Évangile, elle chasse de son sein les personnes qui le portaient. Dieu, alors, recommence son témoignage à Antioche, en faisant des communications et de l’autorité du Saint-Esprit le point de départ de ce témoignage. Jamais le mouvement du monde n’a fait naître ce qui a été le propre témoignage de Dieu.

 

3.5        § [La Réformation n’a pas été une révélation nouvelle. Dieu s’est servi des circonstances, mais dans sa cause, dans son origine et dans son énergie, l’œuvre a été exclusivement intérieure et divine]

Venons-en à la Réformation. Est-elle née des circonstances ? Nullement. C’est (impossible de le révoquer en doute) une âme choisie de Dieu, dont l’angoisse va jusqu’à la mort, une âme par-là dépouillée de sa propre justice, et, chose de grande importance, dépouillée à un haut degré de sa propre force, qui trouve une Bible, et dans la Bible la révélation merveilleuse de la grâce souveraine et efficace de Dieu. Ce n’est pas une nouvelle révélation comme celle de la Loi et celle du Christianisme ; et l’œuvre se mêle ainsi avec la vie intérieure de l’homme, se développe peu à peu dans ses vérités fondamentales avec cette vie même, et revêt jusqu’à un certain point, dans ses effets la mesure de lumière à laquelle l’instrument qui l’accomplit est parvenu. Mais c’est le fruit d’une œuvre intérieure. Les circonstances, les révolutions n’ont nullement donné lieu à la Réformation. L’iniquité profonde qui existait dans ce qui s’appelait l’Église, en tant qu’elle choquait et dégoûtait la conscience naturelle de l’homme, qu’elle froissait l’homme dans ses intérêts, et l’insultait dans les sentiments les plus chers à son cœur, tout cela a été cause que la vérité qui devait délivrer les masses de ce poids insupportable, les a gagnées à l’appui de cette vérité sans avoir pénétré leur cœur ; et l’œuvre de la Réformation est devenue une œuvre multitudiniste et nationale. Les rois et les princes en profitèrent pour se débarrasser du pape, et pour être maîtres chez eux. Les peuples, ne relevant plus de Rome, ne ressortissaient plus qu’à l’autorité temporelle, et ce qui s’appelait l’Église relevait des princes et des rois. Mais, quelle qu’ait été la forme qu’elle a prise, cette œuvre a tiré son origine de Dieu, et puisé sa force en Dieu par la foi. Elle n’a pas été le fruit des circonstances, quoique Dieu ait opéré de bien des manières pour amener ce résultat, soit par des évènements politiques subséquents, soit par l’invention de l’imprimerie et l’introduction de la littérature grecque de Constantinople, qui ont précédé cette époque. Dans sa cause, dans son origine et dans son énergie, l’œuvre a été exclusivement intérieure et divine, bien qu’elle ne fût pas une révélation nouvelle, destinée à imprimer son caractère particulier sur le résultat produit. Une œuvre, qui est en même temps une révélation, conserve son caractère distinctif, quelle que soit l’infidélité de l’homme, par le fait même qu’elle est une révélation. Mais la Réformation a été une œuvre morale dans l’homme, œuvre dans laquelle l’Esprit de Dieu agissait, mais elle était un fruit de l’Esprit de Dieu qui se rapportait à une révélation déjà donnée ; fruit qui, dans l’œuvre, faisait ressortir cette révélation avec une force remarquable, et qui, si l’œuvre venait à manquer, nous renvoyait non à l’œuvre elle-même, mais à la révélation qui en était et la source et l’autorité, de même que l’Esprit de Dieu en était la force. Le christianisme s’appuyait bien sur l’Ancien Testament ; mais il était une révélation nouvelle, nous le reconnaissons tous. Et c’est ce qui fait la différence, à cet égard, entre l’école moderne de Genève et la vérité de la position du chrétien devant Dieu, de nos jours.

 

3.6        [Ne pas apprécier la Réformation, c’est mépriser l’œuvre de Dieu. En faire la mesure de la vérité, c’est méconnaître le christianisme qu’on trouve dans la Parole]

L’œuvre de la Réformation est une œuvre de l’Esprit de Dieu et de la puissance de la vérité, et son histoire me donne une preuve de cette puissance, un effet de cette vérité ; mais elle ne m’en donne pas la mesure. La Réformation n’est pas une révélation qui demeure en conservant toujours le même degré d’autorité, ne cessant jamais d’être la règle de la vérité pour autant qu’elle la révèle. Elle n’en est qu’un fruit, qui peut dépérir, et qui me renvoie à la règle dont l’autorité se maintient intacte à travers tous les siècles. La Réformation n’a jamais été le christianisme lui-même. Le christianisme ne s’y est pas reproduit, et cela par le fait même qu’elle n’était pas une révélation. Elle a été un fruit très-précieux que le Saint-Esprit a produit sur cet arbre déjà planté. En faire la mesure de la vérité, la mesure de ce que Dieu doit faire, c’est en méconnaître la nature ; et, ce qui est bien plus important, c’est méconnaître ce que c’est que le christianisme. Il faut en venir à la Parole que cette Réformation a si heureusement exhumée. L’Église peut avoir besoin de certaines vérités qui s’y trouvent, et que Dieu, dans sa sagesse, n’a pas mises en scène à l’époque de la Réformation. Ne pas apprécier la Réformation, ce serait mépriser l’œuvre de Dieu. Et, d’un autre côté, considérer l’église historique comme ce à quoi nous devons revenir, et comme la mesure de ce que nous devons faire, ce serait méconnaître le Dieu vivant qui y a agi, et qui agit toujours ; méconnaître la Parole qu’il nous a donnée comme seule mesure de notre foi, et la Parole n’en supporte aucune autre ; méconnaître, enfin, la puissance et la suprématie de l’Esprit, et les soins de Christ à l’égard de son Église, comme si nous pouvions imposer à Christ l’idée historique que nous nous faisons de son action une époque donnée, comme une instruction et une mesure pour nous quant à ce qu’Il doit faire maintenant.

 

4         Chapitre 4 – [Suivre des mouvements politiques régionaux ou être à la hauteur du témoignage de Dieu ?]

4.1        [La Réformation n’a pas été un rétablissement intégral du christianisme]

Loin de moi de suggérer à mon lecteur la pensée que l’école dont je parle voulut, en doctrine, établir une autre règle de foi que la Parole. Je parle de son système assez connu par ses écrits, système qui, d’une manière ou d’une autre, se retrouve exprimé dans les constitutions des églises libres, et dans l’Adresse des frères qui se sont retirés du synode de Paris. Or, je crois que prendre historiquement la Réformation comme mesure de vérité, comme le christianisme intégralement rétabli, c’est faire un profond mécompte, et porter atteinte à l’autorité de la Parole dans sa nature, et aux droits qu’elle a d’être seule écoutée.

 

4.2        § [La ligne de conduite est à tirer de la Bible et non de ce qui a été fait à la Réformation, qui est pourtant une œuvre admirable de l’Esprit de Dieu]

Les conséquences s’en font promptement sentir. On est forcé de faire paraître le péché de l’homme comme étant la sagesse de Dieu, parce que Dieu peut se servir de tout. Le luthéranisme, et le calvinisme sont là ; l’anglicanisme et le nationalisme, ou l’union de l’église et de l’état, sont là ; et on se torture pour tirer de ces choses, qui assurément ne se trouvent pas dans la Parole de Dieu, des conséquences philosophiques que l’on applique un jour, et que l’on abandonne ou détruit le lendemain, pour former quelque chose d’entièrement nouveau. Et, pour faire la tentative de cette nouveauté, on nous ramène à l’œuvre qui a produit ce qu’on détruit. Bien qu’il y ait dans la Réformation une œuvre admirable de l’Esprit de Dieu, il ne suffit pas d’adapter aux circonstances du temps présent les vérités alors admises, tâche dont je comprends du reste la portée, et qui renferme un principe juste quant à la marche de l’Église de Dieu. Voulons-nous servir Dieu dans notre génération, prenons la Bible elle-même, non pour mettre en question des vérités déjà acquises (de nouvelles vérités ne peuvent pas mettre de côté les anciennes), mais prenons-la comme la vérité même.

 

4.3        § [À la Réformation, Dieu a mis en relief les vérités nécessaires à l’Église à l’époque. Reconnaître aujourd’hui l’œuvre de Dieu et d’autres vérités puissantes mises à jour]

C’est à cela que je m’attache, et non à une œuvre dans l’homme, quoiqu’elle soit une œuvre de l’Esprit de Dieu. À l’époque de la Réformation, Dieu tout sage a mis en relief les vérités nécessaires à son Église. Et, tout en les recevant, je n’en conclus pas que Dieu n’a rien à me faire connaître de sa Parole qui soit nécessaire aux temps où nous vivons. Autre chose de trouver dans la Réformation la liberté de la pensée de l’homme, c’est-à-dire le principe intellectuel du péché, et voilà à quoi se bornent les rationalistes de tout genre ; autre chose d’y trouver la communication de la vérité dont nous avons à nous servir aujourd’hui, en l’adaptant aux circonstances nouvelles de l’Église, et voilà l’horizon où se renferment les frères des églises libres de diverses nuances (*) ; autre chose, enfin, de reconnaître l’œuvre de Dieu et les vérités puissantes mises au grand jour par la puissance de son Esprit, et de prendre la Bible comme serviteur de Dieu tenu à cette seule règle, sans oser ni reconnaître aucun autre moyen de trouver sa volonté, ni se soustraire à rien de ce qui s’y trouve, en se fiant à Dieu, à son amour fidèle envers son Église, amour selon lequel Il lui communique les choses nécessaires pour les circonstances dans lesquelles elle se trouve actuellement.

 

(*) Le lecteur trouvera, aux pages 11, 12 et 29 de l’Adresse des frères de Paris, leurs principes sur ce point. En voici quelques-uns qui feront comprendre le fond de leur pensée :

« Ainsi naissent, disent-ils, les professions vivantes et populaires de l’Église, qui sont aussi celles de tous ses membres, qui répondent aux attaques actuelles de l’incrédulité, et qui résolvent les difficultés du moment ».

« Nous nous replaçons sur le terrain des Églises réformées de France. Nous relevons de nos faibles mains le vieux drapeau qui traîne dans la poussière. Il vaut la peine de le ramasser, ce noble étendard de nos pères, qui est l’étendard de Christ, de Christ hautement et clairement confessé ».

 

4.3.1        [La Parole parfaite contient des vérités et des lumières nécessaires pour les temps difficiles d’aujourd’hui]

Dans la perfection de la Parole, il y a, je n’en doute nullement, des vérités et des lumières nécessaires pour les circonstances critiques, pour les jours difficiles où nous nous trouvons, que Dieu n’a pas données à ses serviteurs à l’époque de la Réforme ; vérités dont, au moins, ils n’ont pas fait usage, entraînés par les circonstances où ils étaient, et dont, au contraire, nous ne pourrions peut-être pas nous passer, si nous voulons assurer la bénédiction de l’Église en ce moment.

La délivrance d’Israël hors d’Égypte, le Christianisme et même la Réformation procèdent directement de Dieu et de son œuvre. C’est Dieu dans le buisson ; Christ venu du sein du Père ; les Apôtres, envoyés de Lui et remplis du Saint-Esprit ; Paul témoin oculaire de sa gloire ; Paul et Barnabas envoyés du sein de l’Église par la voix du Saint-Esprit ; c’est l’énergie spirituelle qui, puisant son témoignage dans la vérité déjà révélée, la faisait valoir selon la mesure de cette énergie et le don qui lui était départi. Je parle du témoignage lui-même et non des instruments ni de la forme de leur mission. C’est Luther, c’est Calvin que Dieu a suscités pour une œuvre qui prend naissance dans leur foi par sa grâce.

 

4.3.2        [Un témoignage né des circonstances revêt plus ou moins le caractère qu’elles lui impriment]

Or, un témoignage né des circonstances revêt plus ou moins le caractère qu’elles lui impriment. Nous sommes tenus à examiner jusqu’à quel point il est la parole de la patience de Christ [Apoc. 3:10]. La position élevée qu’occupent, soit dans la société, soit dans l’église-monde, ceux qui le rendent, peut être un élément qui a du poids considéré du point de vue de la Providence. Dieu peut s’en servir, et même l’employer pour mettre dans l’ombre et pour ensevelir un témoignage qui ne le possède pas, et cela à cause de son infidélité ; et, si Dieu trouvait bon de le faire, son jugement serait certainement juste. Mais cette considération ne dit rien quant au caractère du témoignage lui-même, et ne peut agir sur la conscience, quoique le fait puisse agir sur les circonstances.

 

4.4        § [Le témoignage de Dieu rabaissé par le fait que les églises libres sont issues des mouvements politiques du jour (révolutions)]

Il est évident, c’est un fait public, que la formation des églises libres a été une suite, un produit des mouvements politiques du jour. La conséquence en a été qu’elles ne se sont pas étendues au-delà de la sphère sur laquelle ces mouvements ont agi. La révolution du canton de Vaud a produit une église libre du canton de Vaud. La révolution de Genève a donné lieu à une église libre ou évangélique de Genève, et la révolution de février est le berceau de l’église libre de France.

Cela monte-t-il à la hauteur du témoignage de Dieu ?

Il y aura, cela se comprend, fraternité entre ces diverses églises. La communauté d’intérêts et de sentiments produira et entretiendra, jusqu’à un certain point, la confraternité ecclésiastique ; car je ne parle pas ici de la fraternité purement chrétienne, qui a évidemment d’autres bases. Mais tout cela répond-il aux besoins que le Saint-Esprit a fait naître dans un grand nombre d’âmes chrétiennes, et aux exigences de l’amour de Christ et des droits de cet amour sur nous ? Ces nouvelles églises nationales libres répondent-elles au témoignage que Christ a donné dans ce moment-ci ? Les circonstances politiques, au sein desquelles elles ont reçu l’existence, n’ont-elles pas laissé sur elles une teinte qui, sous certains rapports, ravale et cache ce témoignage cher à Christ ?

Vous admettrez, mes frères, que c’est un point sérieux pour une âme consciencieuse. Vous m’accorderez que nous sommes obligés de marcher, autant que nous le pouvons, à la hauteur du témoignage du Seigneur. Et je ne veux pas dire le témoignage tout entier qui se trouve dans la Parole, comme si nous l’avions réalisé en entier. Non. Nous sommes tous par ignorance au-dessous de cela. Du moins, ne devrions-nous ni être au-dessous de ce que nous avons compris, ni nous placer dans une position qui, formulée sur la petite lumière que nous avons acquise, nous empêche d’aller plus loin.

 

4.5        § [Reproche de schismes faits à ceux qui ne se joignent pas aux assemblées constituantes des nouvelles églises par motif de conscience à l’égard de la Parole de Dieu]

Ceci est d’autant plus important que l’on nous parle déjà de schisme, si nous ne nous y rangeons pas, et d’un schisme qui afflige toute l’Église. Et ces chers et excellents frères, qui se sont dernièrement séparés du synode de la France protestante, nous déclarent que ce serait scandale que les églises indépendantes ne se joignissent pas à eux, à l’œuvre de l’assemblée constituante qu’ils vont convoquer. Je ne prends pas cela comme s’adressant à moi, car je ne fais pas partie des églises indépendantes qu’ils ont en vue. Je parle comme serviteur de Dieu à la conscience de toute l’Église de Dieu. Je les comprends, et je comprends leur désir de l’unité, et la crainte que leur inspirent les effets de la division. Je ne désire ni affaiblir leur marche, bien loin de là, ni prêter des armes contre eux à ceux qui restent dans le mal. Je n’ai aucune sympathie avec ceux qui y restent, sauf les sympathies de mes prières et d’un cœur chrétien envers des frères que je vois dans quelque chose qui est plus qu’une erreur, que je crois dans une faute très-grave, qui, bien qu’ils ne l’aient pas commise le sachant et le voulant, n’en est pas moins une faute. Je ne leur impute rien. Comme je l’ai dit, Dieu peut souvent faire des derniers les premiers. Nous sommes tous sous sa grâce, seule espérance de nous tous. Mais, quant à leur position, je la crois entièrement fausse. En outre, je ne doute nullement que les frères signataires de l’Adresse aux membres des églises réformées de France ne cherchent sincèrement à faire la volonté de Dieu dans leur assemblée constituante. Mais le point de départ est-il tel que le résultat puisse satisfaire au témoignage de Dieu, à cette parole de la patience que nous sommes appelés à garder ? Et, sans hasarder ici une remarque sur les circonstances au milieu desquelles cette assemblée pourra se réunir, ni sur les conséquences probables des résolutions qu’elle sera appelée à prendre, je me bornerai à présenter quelques considérations sur le témoignage de Dieu, et sur les grands principes qui servent de base à ces églises libres, ainsi qu’à d’autres mouvements religieux encore ; considérations que le Seigneur, je n’en doute pas, m’a fait trouver dans la Parole, qui s’appliquent à tout le mouvement, et qui découlent des vérités qui, dans le fond des pensées de Dieu, précèdent le mouvement et dominent tout le sujet. Si les signataires de l’adresse daignent lire ceci, ils sentiront que je n’ai pas négligé ce que leur cœur a proposé aux chrétiens.

 

5         Chapitre 5 – [La ‘constitution de l’église évangélique de Genève’]

5.1        [Les promoteurs de la ‘constitution’ accusent de schisme ceux qui n’adhèrent pas]

La constitution de l’église évangélique de Genève, formulant quelque chose de précis, me donnera une occasion évidente de présenter mes pensées sur ces choses. Cette constitution ayant, d’ailleurs, la prétention de réunir les chrétiens de cette ville, et réclamant des droits sur nos consciences, demande quelques observations. Cette prétention n’est pas exprimée, et ne pouvait pas l’être, dans la lettre même de la constitution ; mais elle l’est dans les écrits de ceux qui s’en sont occupés, écrits qui accusent de schisme ceux qui ne se rattachent pas à cette église nouvelle.

Je m’adresse, néanmoins, à tous mes frères.

 

5.2        [La ‘constitution’ n’a pas de racines assez profondes dans la vérité de Dieu]

Le fait que l’église évangélique de Genève est l’église d’une seule ville, l’a gardée de certaines choses à mes yeux contraires à la Parole, qui (supportez-moi, mes frères) défigurent la constitution de l’église libre du canton de Vaud. Une bonne partie de sa doctrine exprime franchement des vérités que c’est mon bonheur de croire, et que j’ai de la joie d’entendre exprimées par des frères dont j’honore la sincérité et la piété. Mais lorsque j’en viens à la question de l’Église (et c’est de quoi il s’agit sûrement quand on en fait une), je trouve une lacune, ou plutôt l’erreur qui me parait s’attacher à toute l’œuvre des églises libres, et rendre leur position essentiellement fausse ; et je prie mes frères de bien vouloir considérer sérieusement ce point. Il se trouve au fond de toutes les questions qui, en ce moment, agitent l’Église de Dieu. Je parlerai franchement et à cœur ouvert. Je le dois à mes frères. C’est là la vraie fraternité.

L’erreur qui est au fondement de leur œuvre empêchera toujours, il me semble, qu’elle ne satisfasse aux besoins d’un grand nombre de chrétiens éclairés, ainsi qu’au cœur et aux intentions de Christ, et qu’elle ne réponde ni aux besoins que feront surgir les temps difficiles par lesquels évidemment l’Église de Dieu doit passer, ni à la lumière que ces épreuves, je n’en doute pas, feront jaillir dans les âmes. Leur œuvre sera partielle et ne durera pas, telle du moins qu’elle est actuellement. Elle n’a pas des racines assez profondes dans la vérité, et particulièrement dans la vérité dont Dieu se sert actuellement. Le fondement de la vérité sur l’Église lui manque. Au lieu de tirer son caractère essentiel de la vérité éternelle de Dieu (*), elle le puise dans les circonstances et dans les habitudes du moment ; de sorte que, à mesure que nous avancerons et que les circonstances changeront, elle produira une difficulté de plus.

 

(*) Je parle non du salut, mais de ce qui regarde l’Église.

 

5.3        [Le résultat sera d’attirer et réunir quelques âmes, mais l’œuvre de Dieu désirée ne sera pas faite]

Je supplie mes frères de m’écouter. Je ne mets point en doute leur sincérité. Je sympathise avec eux dans les difficultés par lesquelles ils ont passé, et qui ont eu de l’influence sur leur marche. Je reconnais la foi de plusieurs d’entre eux, qui ont dû agir en présence des circonstances les plus pénibles. Mon cœur s’avance vers eux sous tous ces rapports. En agissant selon les principes exposés dans les diverses constitutions des églises libres, peut-être réussiront-ils à réunir un certain nombre de personnes. Leur foi, leur influence personnelle, les besoins d’âmes nombreuses qui cherchent quelque chose de meilleur, la confiance que leurs personnes inspirent, confiance qu’ils ont sans doute méritée, pour autant que cela peut se dire de l’homme, tout contribuera à cela ; mais je suis assuré qu’ils ne feront pas l’œuvre de Dieu telle qu’ils désirent la faire. Je compte sur leur charité et qu’ils me croiront sincère. J’attends, de leur bonne foi chrétienne, qu’ils me rendront la justice de croire que j’ai étudié la Parole de Dieu à cet égard, et que ce que je leur présente est ce que je crois être une vérité de Dieu absolument nécessaire à la bénédiction de son peuple.

Qu’ils me frappent ! hélas ! j’y suis accoutumé ; mais qu’ils m’écoutent !

 

5.4        § [L’idée de l’Église (l’idée de ce qu’est vraiment l’Église sur la terre selon la Parole) manque]

Voici donc ce que je dis :

L’idée de l’Église, en tant qu’elle se rapporte à la question actuelle, leur manque. Peut-être cette remarque produit-elle déjà de l’impatience. Au nom de la gloire de notre commun Maître, je supplie qu’on m’accorde quelques moments d’attention. Si je ne porte pas la conviction chez ces chers frères que je respecte, au moins leur aurai-je fait connaître des raisons graves, et pour moi obligatoires, en vertu desquelles je ne puis marcher avec ce qui nierait le principe que je vais exposer, parce que je juge qu’en le niant ils ne feraient pas l’œuvre de Dieu. Si la conviction n’est pas produite, la charité du moins y gagnera.

 

5.5        § [Les vérités sur l’Église et sur la venue du Seigneur ne manquent pas seulement dans la ‘constitution’, mais partout. Leur importance est vitale pour le salut et la marche]

Dans les discussions que j’ai eues en Angleterre à ce sujet (je ne parle pas des hérésies affreuses qui y ont éclaté dernièrement), dans mes discussions avec M. Rochat, avec M. François Olivier, dans les arrangements de l’église libre du canton de Vaud, dans ceux de l’église évangélique de Genève, et jusque dans les attaques récentes de M. Monsell, c’est, chez tous, l’absence de l’idée de l’Église qui a signalé tous leurs raisonnements et toutes les constitutions des églises libres. Je crois cette vérité, avec celle de la venue du Seigneur, la plus importante, la plus vitale qu’il puisse y avoir dans ce moment, non pour le salut individuel, mais pour la marche de l’Église de Dieu, et pour celle du chrétien dont le salut assuré est déjà réalisé dans son cœur. Elle jette du jour sur ce salut lui-même, et sur la doctrine qui le constate et qu’elle confirme par de nouvelles lumières. Elle donne à ce salut une importance nouvelle, une portée beaucoup plus grande.

 

5.6        § [Un adversaire nie que l’Église soit un corps, et que les églises forment un corps unique, responsable, ayant une destinée commune]

M. Rochat avait bien compris de quoi il s’agissait ; et, quoiqu’à la fin il ait déclaré que ses idées à cet égard s’étaient modifiées, il avait, en termes clairs et précis, nié l’existence de l’Église telle que je l’avais définie. Il sentait qu’une telle doctrine, si elle était vraie, rendait impossible le système dissident. Il avait raison. Il résume ses vues et les miennes dans les paroles suivantes :

« Mais ce que j’ai nié, ce que je nie encore, c’est ce que l’auteur [JND] affirme et que je le crois incapable de prouver : l’unité de l’Église dans le sens de société ici-bas » … « Une erreur fondamentale, dans laquelle l’auteur est tombé, et qui jette du faux sur toute son argumentation, ... c’est qu’il considère l’Église comme une espèce de corps, » etc. M. Rochat ajoute que les passages que j’avais cités se rapportent « non à une unité sociétaire, qui aurait tendu à faire des églises un corps unique, responsable, et ayant une destinée commune ici-bas quant à son existence comme société, » etc.

 

5.7        § [Un autre adversaire argumente que « les églises diverses n’ont jamais été réunies en une seule assemblée » et que l’Église est formée de « la totalité des croyants dans toute la suite des âges »]

C’est ce même point qui était au fond de ma controverse avec M. Fr. Olivier (Défense des Principes, etc., page 75). Souvenons-nous qu’il ne s’agit pas de l’Église corps infailliblement rassemblé dans la gloire, mais de l’Église corps unique ici-bas.

Voici ses paroles :

M. Darby reconnait que le mot Église signifie assemblée ; et, quoiqu’il n’ait pu nier cette vérité-ci, savoir que le corps de Christ n’a jamais été réellement rassemblé ici-bas, et que les églises diverses n’ont jamais été réunies en une seule assemblée, il ne laisse pas de nous présenter toujours les chrétiens vivant sur la terre, à un moment donné, comme étant une assemblée avec responsabilité de cette assemblée, et il l’appelle l’assemblée de Christ, l’assemblée universelle sur la terre » (*).

 

(*) M. Olivier a dernièrement fait publier une réclamation pour montrer qu’il retient la doctrine de l’Église. Le lecteur trouvera dans le texte le genre de passages qui m’ont fait dire qu’il la tient formellement.

 

« Pourrait-il mieux insister maintenant sur l’idée d’une Église assemblée sur la terre, et recevant, pour cette raison, le nom d’Église ou d’assemblée ? Mais cela ne se peut, non-seulement parce que l’Église n’a jamais été réunie en une seule assemblée ici-bas, mais aussi, » etc. … « Mais que cet ensemble, ce tout ait été une assemblée, et que ce soit pour cela qu’il ait été nommé l’Église, je ne présume pas que l’auteur pense plus à le soutenir » (Défense, p. 88 et 89).

« Quand M. Darby affirme que la totalité des églises ici-bas forme l’Église, il va aussi trop loin, attendu que ce qui forme l’Église, c’est non-seulement la totalité des églises dans un moment donné, mais la totalité des croyants dans toute la suite des âges, entre le premier et le second avènement de Christ.

« La manière de penser de M. Darby a pour effet de diviser le corps de Christ en deux, et même de faire deux corps de Christ, si je puis dire ; savoir : premièrement, ce prétendu corps de Christ que Dieu aurait créé complet sur la terre, » etc. (Défense p. 93).

« Je ne pourrais me charger d’aucune responsabilité relativement à ce prétendu corps extérieur, .... ou à cette soi-disant assemblée qui pourtant n’a jamais été assemblée » (Défense p. 125).

« Or cette vue est contraire, à la fois, aux notions que l’Écriture nous donne de la totalité et de l’unité de l’Église, ainsi que de l’assemblée de l’Église, puisque le corps terrestre de Christ, que M. Darby croit avoir été formé d’une totalité d’églises disséminées, n’aurait jamais été réellement rassemblé ici-bas » (Défense p. 94, et Essai sur le roy. de Dieu p. 116 et 117).

Tel est le langage de M. Olivier.

 

Je ne ferai aucune observation sur les passages que je viens de citer. Je me borne à prier le lecteur de ne pas prendre ce qui y est dit de mes vues comme en étant une représentation exacte. Je ne tiens qu’à constater le fait quant à la doctrine.

 

5.8        § [La ‘constitution’ tient l’idée d’un corps invisible qui ne sera manifesté qu’au dernier jour, et que les églises particulières comprennent des non-régénérés]

L’église évangélique de Genève croit que les églises particulières, établies en divers lieux, et plus ou moins mélangées de régénérés et d’inconvertis, doivent, etc. ; « .... elle croit aussi qu’au-dessus de toutes ces églises particulières qui ont été, qui sont et qui seront, il existe devant Dieu une sainte Église universelle, composée de tous les régénérés, et formant un seul corps invisible dont Jésus-Christ est la tête, et dont les membres ne seront entièrement manifestés qu’au dernier jours » (*).

 

(*) C’est la reproduction des vues de M. F. Olivier, avec cette différence que M. Olivier fait consister l’Église en tous les croyants entre la première et la seconde venue de Jésus, et que la constitution de l’église évangélique de Genève la compose de tous les régénérés, expression qui doit embrasser aussi les fidèles de l’Ancien Testament.

 

Voilà des idées assez précises. Il y a des églises particulières, et il y a une Église universelle invisible. Or, je dis que l’idée de l’Église, telle que la Parole de Dieu la présente, est entièrement perdue ici.

 

5.9        § [Constitution vaudoise : les églises vaudoises sont vues comme un corps, une église, l’épouse de Christ]

La Constitution de l’église libre du canton de Vaud va plus loin. Elle fait des troupeaux vaudois un corps qui, selon elle, est une église et l’épouse de Christ.

M. Monsell expose les mêmes vues au fond ; mais je laisse ici son écrit de côté, j’en parlerai ailleurs.

Il n’est pas nécessaire, non plus, de parler des opinions qui ont cours en Angleterre.

 

5.10   § [Les idées précitées font qu’on ne cherche même pas une unité, on en reste à des mouvements nationaux]

Une conséquence évidente des opinions que je viens de citer, c’est qu’il n’existe pas une unité pareille à celle que l’on trouve aux temps apostoliques, et qu’on ne la recherche même pas. Les mouvements dont nous sommes témoins ont lieu par nation. Nous avons une église libre d’Écosse, une église libre du canton de Vaud, une église évangélique de Genève et des églises réformées de France (*).

 

(*) J’ignore si nos frères de France ont fait un pas dans leurs idées ecclésiastiques, et s’ils ont rejeté l’idée d’une église réformée de France. En général, ils parlent des églises réformées de France ; mais ils parlent aussi d’une église, et l’assemblée constituante projetée semble devoir réunir les églises réformées de France en un corps. Quelques éclaircissements seraient à désirer sur ce sujet. Personne, en ce moment, ne chercherait à leur créer des embarras en les engageant à s’exprimer là-dessus ; pas moi, du moins. Leur Adresse n’étant que provisoire, peut-être ne faut-il y chercher qu’un langage longtemps usité. Quoi qu’il en soit, qu’ils parlent des églises ou d’une église réformée, il s’agit toujours d’une église de France ou des églises de France.

 

Or, quelle est l’idée scripturaire de l’Église ?

 

5.11   [Église invisible : quelques arguments pour et contre. Cette notion remonte à St Augustin]

Je laisse de côté l’idée de l’Église invisible, idée qui ne se trouve pas dans la Bible. Une assemblée invisible est à peu près un non-sens. Il y aura une Église universelle manifestée dans la gloire à la journée de Christ (*). Loin d’être invisible, elle sera vue dans toute la gloire de son Chef. Les enfants de Dieu, hélas ! ne sont que trop souvent cachés dans le monde, et c’est dans ce sens qu’on peut parler d’une Église invisible. Dans ce cas, où est la cité située sur une montagne ? Où est la lumière que le Seigneur n’a pas voulu mettre sous le boisseau ? Dire Église, c’est dire assemblée. M. Olivier se sert de ce mot pour dire que, puisque les fidèles n’ont jamais été tous assemblés, il n’y a pas eu d’assemblée, ni par conséquent d’Église, sinon par une figure qui consiste à parler de la partie pour le tout.

 

(*) La constitution de l’église évangélique de Genève n’admet pas la visibilité de l’Église, même dans la gloire. Les membres de l’église invisible seront manifestés au dernier jour. Ceci fait voir à quel point l’idée du corps de l’Église est détruite par cette notion d’église invisible, notion qui, du reste, date, je le pense, du temps de St. Augustin, époque où l’Esprit de Christ faisait sentir à l’homme pieux que l’église extérieure ne répondait nullement à ce que la Parole disait de l’Église, tandis que le corps extérieur était toujours l’église pour les consciences superstitieuses. On sait quelle influence St. Augustin a exercée sur la Réformation, quoique l’énergie du St. Esprit agissant dans les Réformateurs ait de beaucoup dépassé la mesure de St. Augustin. On fera bien de se souvenir que le mouvement actuel cherche à nous ramener sur le terrain de la Réformation. Et, quelque précieuse qu’ait été cette œuvre, est-ce là toute la pensée de Dieu que de nous y ramener ! Peut-être nos frères de France ne se borneront-ils pas à s’y arrêter. Ils ne sauraient bénir Dieu plus que moi pour l’œuvre même de la Réformation. Plût à Dieu que nous eussions l’énergie qui s’y est déployée !

 

5.12   [Ce qu’enseigne la Parole de Dieu sur l’Église]

5.12.1    [Église sur la terre, responsable de la manifestation de la gloire de Jésus et de l’amour du Père, un corps agissant par ses membres]

La Parole de Dieu, au contraire, parle positivement, comme d’une affaire de foi, d’une assemblée, d’une Église sur la terre, responsable de la manifestation de la gloire de Jésus et de l’amour du Père, d’un corps agissant par ses membres.

Je n’insiste pas sur l’Église comme devant être plus tard complètement rassemblée dans le ciel, parce que je pense que nous la reconnaissons tous (*). Je ne parle pas des églises particulières formées dans chaque ville, parce que je les reconnais dans la Parole, je le pense, à peu près comme tous nos frères. Lorsqu’il s’agit des sectes et des dénominations, ce sujet devient, il est vrai, important.

 

(*) Nous l’avons vu, néanmoins : cette idée est singulièrement affaiblie, et même perdue, dans la constitution de l’église évangélique de Genève.

 

5.12.2    [Église : distinguer le corps sur la terre avec le Saint Esprit, et l’état céleste en gloire. Position de responsabilité à l’égard de ce qui sera accompli plus tard par puissance]

Je parle de l’Église sur la terre. Or, ce que je trouve dans la Parole, c’est une assemblée sur la terre formée dans l’unité d’un seul corps par le Saint-Esprit descendu du ciel, le Chef étant dans le ciel.

On remarquera que le fait que le Saint-Esprit est descendu du ciel est ici d’une importance capitale, parce que c’est ce qui établit nettement la distinction entre l’état du corps vu ici-bas, et l’état céleste de l’Église en gloire. Dieu, dans l’accomplissement de son conseil, établira l’Église corps de Christ dans la même gloire que son Chef dans le ciel. C’est là l’idée de l’Église dans sa plénitude ; mais, ainsi que cela a toujours lieu, Dieu a d’abord placé l’homme dans une position de responsabilité à l’égard des choses qu’il a voulu accomplir plus tard par sa puissance. C’est ainsi qu’Israël a été placé sous cette loi qui, plus tard, sera écrite dans son cœur. Or, s’il en est ainsi, il est évident que le sort de l’Église sur la terre dépend et de cette position, et de la fidélité qu’elle y déploie. Mais c’est cette Église-là que méconnaissent, que nient, ou ne comprennent pas, ceux mêmes qui agissent pour la relever dans le moment important où nous sommes.

 

6         Chapitre 6 – [L’Église constituée en un seul corps sur la terre, et la présence du Saint Esprit en est la source et la force]

Voyons si la Parole de Dieu nous montre une telle Église, corps un et unique sur la terre.

Je répète ma pensée.

Christ étant monté auprès du Père, le Saint-Esprit est descendu non-seulement pour vivifier (cela avait déjà lieu), mais pour rassembler en un seul corps sur la terre les enfants de Dieu, corps de l’unité duquel sa présence était la source et la force, de sorte que tous les croyants étaient membres de ce corps-là.

 

6.1        [Ce qu’en disent plusieurs passages de la Parole de Dieu :]

Que dit la Parole sur ce sujet ?

 

6.1.1        [Éphésiens 1]

Éph. 1:22. Ce passage nous donne l’idée du grand résultat dans les conseils de Dieu, savoir : toutes choses soumises à Christ, qui les avait créées, et l’Église unie à Lui comme un corps dont il est la tête ; le corps étant ainsi l’accomplissement de la tête, qui ne pouvait rester seule sans le corps.

Le français, le français moderne du moins, ne rend guère cette idée, parce que le mot chef dans l’acception de tête a vieilli, et qu’on ne peut guère dire de Christ qu’il est tête sur toutes choses, quoiqu’on puisse dire : à la tête de tout. En prenant chef dans sa signification étymologique de tête, le sens est clair : chef sur tout choses à son corps, qui complète ce chef pour former un tout.

 

6.1.2        [Éphésiens 2]

Le second chapitre de l’épître aux Éphésiens nous présente le moyen que Dieu emploie pour l’accomplissement de cette œuvre de grâce, c’est-à-dire ce qui se fait dans le temps pour l’accomplissement du dessein éternel de Dieu. Les Juifs avaient été un peuple rapproché de Dieu ; les Gentils en étaient restés éloignés, et demeuraient, en même temps, séparés des Juifs par les ordonnances qui constituaient ceux-ci comme peuple de la part de Dieu. Par sa mort, Christ a aboli ces ordonnances pour faire des deux un seul homme nouveau, et pour les réconcilier en un seul corps à Dieu par la croix. Puis, la prédication en a été faite à ceux qui étaient proche, et, dit Paul aux Éphésiens gentils, « à vous qui étiez loin » ; de sorte qu’ils étaient bâtis sur le fondement des Apôtres et des Prophètes (prophètes du Nouveau Testament ; comp. 3:5), Jésus-Christ étant la maîtresse pierre du coin, en qui tout l’édifice bien ajusté croit en temple saint dans le Seigneur, « en qui, vous aussi, vous êtes édifiés pour être une habitation de Dieu par l’Esprit » (*).

 

(*) Quelques-uns ont voulu ne voir ici que l’église d’Éphèse : mais il est évident que, dans tout ce passage, tout en s’adressant aux Éphésiens, le vous ne signifie pas seulement : vous, Éphésiens, mais : vous Gentils.

 

Où ? C’était assurément sur la terre que le tabernacle de Dieu se trouvait par la présence du Saint-Esprit.

 

6.1.3        [Éphésiens 3]

Au chapitre 3 de la même épître, il explique le mystère, savoir, que les Gentils sont un même corps avec les Juifs (σύσσωμα ; v.6), et il termine en disant : « À celui qui peut faire en nous au-delà de ce que nous pensons, à Lui soit gloire dans l’Église dans toutes les générations du siècle des siècles ! »

L’Église est donc considérée ici objectivement dans toute son étendue possible ; mais elle est, néanmoins, vue comme un seul corps sur la terre, et comme étant sur la terre l’habitation de Dieu par son Esprit, qui est descendu et qui a réuni Juifs et Gentils dans ce seul corps. C’est là la vocation au sujet de laquelle il est dit : « Marchez d’une manière digne de votre vocation ».

L’unité n’est pas simplement une unité de vie. La vie ne fait pas l’unité. Je prie mes chers frères d’y faire attention. La source de l’unité, c’est le Saint-Esprit descendu du ciel. Et, quoique nous ayons une foi et des sentiments communs, la vie nous laisse dans l’individualité. Communauté de sentiments et de foi, voilà en général tout ce qu’on cherche, et ce qu’on veut appeler unité. La présence du Saint-Esprit lui-même nous unit en corps, et fait de nous des membres de ce corps. Dans l’esprit de l’Apôtre, les motifs et le caractère de l’unité se puisaient dans l’existence du corps, et il nous exhorte à « garder l’unité de l’Esprit par le lien de la paix ; car il y a un seul Esprit et un seul corps ». Et sur quel fondement l’Apôtre établit-il ces choses ? Sur ce que Christ est monté en haut, et qu’il a donné des dons aux hommes (nous savons que c’est par le Saint-Esprit descendu d’en haut) pour édifier le corps de Christ, « duquel tout le corps ajusté ensemble, et s’accroissant par chaque jointure fournissante (permettez-moi ce mot) selon la mesure de l’énergie de chaque partie (*), se fait à lui-même l’accroissement du corps à l’édification de lui-même en amour ». Le corps de l’enfant est bien un corps. Il prend néanmoins de l’accroissement. Voilà l’idée de l’Esprit de Dieu. J’ai dit : « se fait à lui-même », car la forme de l’expression grecque l’implique. Quoi qu’il en soit, la doctrine est évidente. Tout le corps, agissant par ses membres, se fait et produit l’accroissement de lui-même. Le Corps est là. Il croît, mais il est là, et c’est certainement sur la terre. Il ne croît pas par les dons dans le ciel. Ce n’est pas dans le ciel que le ministère s’exerce. C’est pendant la période où Christ est en haut, et où le Saint-Esprit envoyé d’en haut est ici-bas, que cela se fait, en contraste avec l’état céleste du corps. Dieu a voulu que ce corps fût placé ici-bas dans cette position d’activité responsable selon la puissance de la présence du Saint-Esprit, avant de le manifester comme résultat accompli de ses desseins, selon l’efficace de sa puissance, qui ne laisse, en ce qu’il veut accomplir, aucune lacune, aucun défaut, rien qui ne réponde pas à son intention.

 

(*) L’expression de chaque partie serait mieux rendue par la tournure vieillie : d’une chacune partie.

 

6.1.4        1 Corinthiens 12]

La première épître aux Corinthiens nous enseigne la même vérité : « Comme le corps est un et a plusieurs membres, et que tous les membres de ce seul corps, étant plusieurs, ne sont qu’un seul corps, ainsi est le Christ. Car, par un seul Esprit, nous avons tous été baptisés pour être un seul corps, etc. » Ce baptême du Saint-Esprit, c’est bien sur la terre qu’il a lieu (Actes 1:5). « Or, vous êtes le corps de Christ et ses membres en particulier, et Dieu a mis dans l’Église premièrement des Apôtres, … des dons de guérison, » etc. Mis, où ? Ce n’est pas dans le ciel, assurément. Il y a donc un corps, l’Église, sur l’unité duquel l’Apôtre insiste ; unité qui doit se trouver sur la terre. L’Apôtre parle du corps, de l’Église, de l’unité comme de choses existantes et manifestées sur la terre, non d’une manière accidentelle, ou comme partie d’un tout qui touche à la terre par une de ses extrémités, mais comme découlant de la présence du Saint-Esprit descendu du ciel pour former cette unité sur la terre, pour rassembler en un les enfants de Dieu qui étaient dispersés. Quoiqu’il y ait, pour ceux dont le service déjà terminé, le repos des invalides, l’armée n’en est pas moins une armée ; elle ne cesse pas non plus d’être encore un tout, quoiqu’elle se recrute de temps en temps de nouveaux soldats.

 

6.2        § [Échec du témoignage rendu par l’Église à la gloire de Christ. Elle sera enlevée et manifestée en gloire, mais retranchée quant au service sur la terre, et une autre économie la remplacera]

Tout en admettant l’unité de l’église manifestée en son temps dans la gloire, et l’existence d’églises particulières, voilà l’unité de l’Église telle qu’elle est très-clairement présentée dans la Parole de Dieu ; et, quant au résultat final à l’égard des siens, Dieu gardera cette Église jusqu’à la fin. Mais, en tant que manifestée sur la terre, elle était tenue à maintenir le témoignage de la gloire de Christ, selon la puissance de l’Esprit qui était en elle.

L’Église l’a-t-elle fait ?

Il s’agit non de la fidélité de Dieu, mais de celle de l’Église. Dieu est fidèle pour garder les chrétiens individuellement. Mais, bien que l’Esprit demeure en lui, le chrétien individuellement est souvent infidèle. Eh bien ! si, comme système que Dieu a établi pour la manifestation de sa gloire ici-bas, l’Église a manqué à son témoignage, Dieu peut la mettre de côté quant à ce témoignage. Il ne l’a pas encore fait ; et, quant au résultat voulu de Dieu, l’Église sera ressuscitée et dans la gloire. Je parle non-seulement du salut, mais de la manifestation de l’Église. Les portes du Hadès ne prévaudront point contre elle, et Dieu la gardera à travers tout au moment de son enlèvement. Mais, à côté de cela, elle a été formée pour rendre ici-bas témoignage à la gloire de Christ. Ayant manqué à ce but, Dieu peut la retrancher quant à ce service, avec tout le système qui s’attache à elle ici-bas. La Parole de Dieu rend le témoignage le plus clair que c’est ce qu’il fera, et qu’il introduira une autre économie dans laquelle Christ exécutera personnellement le jugement, et maintiendra la justice et la gloire de Dieu sur la terre. C’est alors que l’Église, selon les conseils de Dieu, sera tout entière telle qu’elle a été préconnue, et qu’ayant été recueillie en haut comme épouse de l’Agneau, elle sera manifestée en gloire.

 

6.3        § [Les systèmes d’églises libres et de dissidence méconnaissent l’idée que la Parole donne de l’Église (malgré du bien produit grâce à de la fidélité). Le fondement qu’on pose nie celui posé par Christ]

Or, tous les systèmes d’église libre et de dissidence laissent de côté l’idée que la Parole donne de l’Église. En conséquence, les tentatives de rétablir l’Église par de tels moyens pèchent dans leur fondement, dans leur premier principe, dans l’idée mère de tout ce qui se fait. Les auteurs de ces systèmes ne se placent pas devant Dieu selon ses pensées à cet égard. Quelque excellentes que soient leurs intentions, leur conscience n’en est pas atteinte. Ils ne cherchent pas auprès de Dieu ce que les circonstances exigent, parce qu’ils n’ont pas la pensée de ce que Dieu y voit. Comment mesurer le mal quand ils ne voient pas ce qui devrait être ? N’ayant pas l’idée d’où ils sont tombés, ils ne peuvent, en conséquence, écouter l’exhortation qui les appelle à y penser. Ils peuvent faire un certain bien, car Dieu est bon. Ce ne sera bientôt qu’une difficulté de plus sur le chemin de la fidélité et du témoignage de Dieu.

J’engage mes frères à lire Ésaïe 22:8-14 ; non que je désire prononcer le jugement qui s’y trouve ; je les prie uniquement de peser le principe moral qui y est développé. Toutefois, le moment dont il est question dans ce passage est celui où Dieu s’est manifesté en faveur d’Ézéchias, parce qu’il y avait quelque fidélité (2 Chron. 32:4, 5).

Il y a bien d’autres passages relatifs à l’Église que ceux mentionnés plus haut. Ainsi, dans la première épître à Timothée 3:15, il est certain que c’est, sur la terre, la Maison de Dieu ici-bas. Dans l’Apocalypse, l’Épouse dit : « Viens ». C’est évidemment sur la terre. Les Écritures en donnent bien d’autres preuves encore, mais je n’ai cité que les passages qui traitent expressément le sujet.

Voilà donc, chers frères, tout en vous respectant, à quelque pays que vous apparteniez, pourquoi je ne puis pas me joindre aux églises libres telles qu’elles se sont présentées jusqu’à présent. Ce qui m’en empêche, ce n’est pas seulement que, dans les diverses organisations de cette œuvre en divers pays, et dans d’autres points de détail, je ne les trouve pas fondées dans la Parole de Dieu, ce n’est pas même l’ignorance de cette précieuse et importante vérité de l’unité de l’Église sur la terre, établie par le Saint-Esprit descendu ici-bas. Vous trouveriez au milieu de nous, je n’en doute pas, des personnes qui l’ignorent aussi. Ce qui m’en empêche, c’est que cette œuvre, et prenons comme exemple la constitution de l’église évangélique de Genève, le fondement qui est posé nie le fondement que Christ a posé pour ce qui doit lui être en témoignage ici-bas. Ce qui est le plus près de son cœur, quant à ce qui est ici-bas (et c’est à cela que notre responsabilité se rattache), voilà ce qui devrait être le plus près de notre conscience. Mais l’œuvre dont il s’agit est la dénégation même du principe en question. Pour rétablir, pour relever l’Église, et c’est bien là ce que vous prétendez faire, vous donnez pour fondement à votre œuvre la dénégation de celui que le Seigneur Jésus a établi. Vous me comprendrez, mes frères bien-aimés. Je ne parle ni du salut des individus, ni de votre amour personnel pour le Seigneur. Ce n’est pas là, vous en conviendrez, ce dont il s’agit entre nous. Je parle des systèmes que vous établissez. Cela nuit à tout le développement de la vérité ; mais je ne m’étends pas sur ce sujet en ce moment, ni ne m’arrête à certains détails qui ont fait naître de graves difficultés.

 

7         Chapitre 7 — [Suite de « La constitution de l’église évangélique de Genève »]

7.1        [La ‘Constitution’ : Le sacerdoce universel est bridé par un ministère constitué d’Anciens officiellement établis]

La constitution de l’église évangélique de Genève réclame quelques observations ultérieures.

Cette constitution vise essentiellement à l’établissement d’un clergé, et voici comment. Elle enveloppe tous les dons dans l’établissement des Anciens, qui forment un Ordre à part.

« L’Église, dit cette constitution, reconnaît le sacerdoce universel des croyants, en vertu duquel chacun d’eux est appelé à s’approcher de Dieu sans autre intermédiaire que Jésus-Christ, pour lui rendre culte en esprit et en vérité, et à publier les vertus de Celui qui l’a sauvé ».

Je pense que, sans avoir entendu parler du sacerdoce universel des croyants, on a reconnu que chacun peut adorer Dieu sans que cela soit octroyé par la constitution. Et, pourvu que le clergé soit reconnu, on admet généralement que chaque chrétien est admis à publier les vertus de Celui qui nous a appelés. C’est admettre le sacerdoce universel de manière à le limiter autant que faire se peut dans les circonstances où nous nous trouvons (*).

 

(*) La manière dont l’article cité plus haut parle du culte est bien peu satisfaisante. Les relations des disciples avec le Père y sont complètement oubliées ; et il a cité 1 Pierre 2:9, en omettant même 2:5, et a confondu cela avec Jean 4, dont il mentionne le verset 24 en omettant le 23. La relation des disciples avec le Père, en Christ et en son nom selon la puissance de Jean 16:26,27, est omise. Ces choses deviennent très importantes quand il s’agit d’énoncer les fondements des relations des croyants avec Dieu. Elles formulent le caractère de la foi de tous ceux qui sont jetés dans ce monde ; et Dieu veut même que leur état soit selon leur foi. Il est dans l’ordre de son gouvernement que le principe vital des choses se reproduise dans toute la durée de leur existence. Des défauts accidentels disparaissent par l’influence de la grâce. Les principes créateurs se reproduisent, et même se développent. Aussi n’est-il pas sans importance de peser soigneusement ces constitutions ecclésiastiques. Et, quoiqu’elles puissent renfermer de très-bonnes choses, le chrétien doit examiner sur quel fondement tout cela repose, et si c’est celui que Christ a posé. S’il n’en est pas ainsi, ce n’est pas s’opposer à ses frères que de ne pas se joindre à eux. Il faut user de support envers l’ignorance. Elle se montre en nous à l’égard de bien des choses, même d’entre celles que nous devrions savoir. Je n’ai pas besoin de dire à mes frères que j’en ai la conscience. La lecture de la Bible me le fait tous les jours profondément sentir, et je regarde en haut. Mais placer l’ignorance à l’origine de sa marche, c’est autre chose. Cela déshonore Christ, et cela vicie dans son origine, et ainsi, en tant que cela dépend de l’homme, dans toute son existence, ce que Christ a de plus précieux ici-bas, son Église qu’on prétend relever.

 

« Toutefois, ajoute la constitution, l’église évangélique reconnaît la nécessité d’un ministère spécial comme une institution de Dieu et un besoin permanent de l’Église. En conséquence, elle a des Anciens et des Diacres ».

Voilà le ministère tout le ministère. C’est ce que confirme l’article suivant :

« Les Anciens sont tous chargés de paître l’église. On distingue parmi eux les ministres de la Parole, qui, préparés par de saintes études, sont plus spécialement appelés à l’enseignement et à la prédication ».

Je reconnais pleinement le ministère, un ministère spécial, comme une chose instituée de Dieu.

Est-ce cela dont il s’agit ici ? Non. L’article cité interdit absolument tout ministère en dehors d’un ministère officiellement établi par les hommes. « L’Église reconnaît un ministère.... En conséquence, elle a des Anciens et des Diacres ».

Je laisse pour le moment les Diacres de côté,

 

7.2        § [Exiger imposition des mains et études de théologie pour qu’un ministère soit reconnu, c’est refaire un clergé et nier l’autorité et les dons de Christ]

Parmi les Anciens, on distingue des Anciens qui sont ministres de la Parole, et des Anciens qui ne le sont pas, mais on ne reconnaît aucun autre ministère que celui qui a été officiellement établi par l’imposition des mains. Outre les Diacres, les Anciens à eux seuls forment le ministère. C’est tout simplement le clergé sans avoir la franchise de le dire. Quoi d’autre ? Le seul ministère est celui de l’Ancien établi ; encore, pour être ministre de la Parole, faut-il de plus avoir été préparé par de saintes études. Qu’est-ce que cela, sinon le clergé ? Y a-t-il moindre différence ?

Supposons un chrétien béni de la part de Dieu comme évangéliste pour la conversion de dix fois plus d’âmes que tous vos Anciens ensemble, à cause des dons que Dieu lui a départis. Peu importe ; ce n’est pas un ministère, et il n’est pas ministre de la Parole, parce qu’il n’est pas au nombre de vos Anciens consacrés. Peut-être est-ce un jeune homme non marié, qui n’a pas les qualités voulues de Dieu pour un Évêque ; pas même peut-être, le don d’enseigner ; car on peut être bon évangéliste sans avoir ce don. C’est égal. Il ne peut être ministre de la Parole. Il n’est pas au nombre de vos Anciens.

Et vous criez au schisme parce qu’on ne se soumet pas à de pareilles choses !

Malheur à celui qui renie assez l’autorité de Christ et le don de Dieu pour s’y soumettre !

Vous biffez d’un trait de plume le quatrième chapitre de l’épître aux Éphésiens. Vous niez l’autorité de Christ dans sa propre Maison, ainsi que les droits du Saint Esprit, et vous parlez de désobéissance ! Vous confondez l’Évêque avec l’évangéliste : vous ne voulez pas qu’il y en ait, à moins que ce ne soit de vos Évêques ; et, s’il y en a d’autres de la part de Dieu, vous niez que cela soit un ministère, et vous voulez que nous nous soumettions à cela, sous peine de votre anathème comme schismatiques ! Est-ce donc vous qui avez la clef de David pour fermer et pour ouvrir, de sorte qu’il n’y ait point de ministère, sinon celui de vos Évêques et de vos Diacres ?

Vous décidez trop vite, mes frères. Le Maître est encore là. Mieux vaudrait pour vous de vous remettre un peu plus à Lui. Est-ce sa Maison que vous dirigez ainsi ? Prenez garde ! C’est une affaire sérieuse que de s’occuper de l’Église qui lui appartient. Il est Fils sur sa propre Maison. Il agira malgré vous. Il ferme et personne n’ouvre ; il ouvre et personne ne ferme. À cet égard, votre position est plus mauvaise que celle de l’ancien clergé, qui ne rencontre presque plus l’appui de personne. L’ancien clergé est dans une position fâcheuse ; du moins obéit-il à des traditions dont la suite des siècles avait donné l’habitude. Mais, ici, celui qui s’est mis en avant dans cette œuvre, professe que le clergé est de l’Ennemi, et, cet aveu à la bouche, il refait le clergé, j’en prends votre constitution à témoin ! Car nier tout ministère qui n’est pas celui de vos Anciens consacrés, ne reconnaître d’autres ministres de la Parole que vos élèves de théologie, qu’est-ce sinon instituer un clergé ? Et vous le rétablissez en disant que vous n’en voulez plus.

L’article 12 de votre constitution, où il est fait mention de « frères qui pourraient être appelés à quelque œuvre d’évangélisation », semble renfermer une contradiction. Mais non. Cet article, qui, d’une manière si singulière, parle de ces frères appelés à quelque œuvre d’évangélisation, les mentionnant à côté des ministres de la Parole, comme si ceux qui sont appelés (de Dieu, je pense) à quelque œuvre d’évangélisation n’étaient point eux-mêmes des ministres de la Parole, veille à ce que ceux-ci aussi (car on sent qu’il y en aura malgré tout) n’échappent pas au système clérical, et ne travaillent pas sans que le Presbytère leur ait imposé les mains. Oui, vous établissez un clergé, et un clergé impitoyable qui ne supporte pas que personne travaille en dehors de son autorité, et qui accuse de schisme tous ceux qui le font C’est par conséquent plus qu’une secte. C’est Rome en petit. C’est Rome dans son système ; et c’est, de fait une secte.

 

7.3        § [Discipline]

7.3.1        [Sous prétexte de « concilier l’unité dans la foi avec la variété dans la forme », on impose des règles qui nient l’unité de l’Église de Christ]

Une autre chose à remarquer, c’est la discipline.

Chère assemblée de la Pélisserie, si vous n’eussiez pas voulu le clergé, vous ne seriez pas descendue à ce point-ci. Et je le dis avec des sentiments d’affection sincère pour les frères qui s’y trouvent. Après avoir été lié avec eux par les liens les plus doux, je suis encore lié à eux par les liens les plus forts, ceux de la charité. Frères de la Pélisserie, le principe du clergé vous a perdus, et maintenant vous vous jetez là où l’on en cueille les fruits !

Afin de satisfaire aux exigences de votre position, on a cherché « à concilier l’unité dans la foi avec la variété dans la forme ». L’église nouvelle a « reconnu qu’il existe parmi ses membres des besoins différents quant au culte ». En conséquence, vous pourrez servir Dieu à part chaque dimanche, à l’exception d’un dimanche par mois. Et, en échange de ce sacrifice (et c’est là ce qu’on appelle unité !), on vous accorde l’avantage d’être membres (*) de l’église nouvelle.

 

(*) Principe qui, à lui seul, nie l’unité de l’Église de Christ. Nous sommes membres de son corps, et de rien autre.

 

7.3.2        [Au-delà des conseils et de la répréhension fraternelle, la discipline ultime est exercée par un « presbytère » = conseil d’Anciens : c’est encore refaire un clergé]

Quant à la discipline, qui maintient ce corps et son ordre extérieur, et qui vous fait savoir quels en sont les membres, la voici :

« La discipline s’exerce par la répréhension fraternelle dans la charité, afin qu’en toutes choses la doctrine de Dieu notre Sauveur soit glorifiée au milieu de tous. Ce devoir concerne tous les frères, et plus spécialement les Anciens. Dans des cas extrêmes, ceux-ci pourront avoir recours au Presbytère ».

Est-ce tout ?

Oui, c’est tout. Le retranchement n’est pas même mentionné. Il est exclu, car la discipline s’exerce par la répréhension fraternelle.

Mais, direz-vous, quoique les premières paroles citées soient trop larges, il y a quelque chose de plus pour les cas extrêmes.

Oui, il y a autre chose, et c’est ceci : « Ceux-ci (les Anciens) pourront avoir recours au Presbytère ». N’est-ce pas assez dire que la chose est entièrement remise au clergé, et que la conscience des frères est comptée pour rien du tout ?

Que les Anciens éclairent la conscience du troupeau, le conduisent à un jugement sain et l’exhortent à agir selon la Parole ; qu’ils réussissent même à terminer heureusement maintes choses sans l’intervention du troupeau, et même mieux qu’avec cette intervention, c’est là assurément un bien. Mais, dans l’article qui nous occupe, le recours au Presbytère par les Anciens dans les cas extrêmes, voilà la discipline de l’église évangélique. Pour entrer dans son sein, elle demande une profession de foi en présence de deux Anciens. S’agit-il de juger ceux qui sont entrés, les Anciens peuvent avoir recours au Presbytère. Pour le ministère, il y a des Anciens consacrés, dont quelques-uns sont des ministres de la Parole, préparés à cela par de saintes études. Et les fidèles, que peuvent-ils faire ? Obéir. On les a maintenant pourvus d’Anciens, de personnes officielles auxquelles ils peuvent obéir.

Si ce n’est pas là le clergé, on aura assurément de la peine à savoir ce que c’est.

 

7.4        § [‘Constitution’ ou ‘profession de foi’ obtenues par concessions mutuelles : le témoignage est réduit au niveau le plus bas, la vérité est tronquée, l’Esprit est contristé]

Hélas ! il reste encore sur la question en général des difficultés très-graves, qui tiennent et au caractère de l’œuvre, et à cette église historique qui, en pratique, lui sert de fondement et qui donne la mesure de la vérité qu’on y professe comme témoignage.

Je reconnais, mes frères, votre désir sincère de maintenir les vérités fondamentales contre de funestes erreurs, et je l’apprécie, je crois, sincèrement. Mais l’unité de l’Église, vrai lien des saints, étant mise de côté aussi bien que la liberté de l’Esprit, qui, centre de cette unité, se trouve là seul, il faut arriver à un accord à l’aide de concessions mutuelles, qui réduisent le témoignage au degré le plus bas de l’échelle, et qui ainsi contristent le Saint-Esprit qui rend ce témoignage.

Cette vérité, tronquée par des concessions réciproques, devient la mesure de la foi du corps qui se réunit sur ce fondement-là. Si, après avoir signé une confession de foi de ce genre, afin de m’accommoder à d’autres personnes qui ne croient pas ce que Dieu m’a donné de croire, afin de marcher avec elles par ce moyen, et parce qu’elles ne veulent pas admettre plus que cela, j’insiste sur la vérité que Dieu m’a confiée, je manque à mon engagement tacite, puisque nous sommes ensemble sur ce terrain-là. Un tel engagement contriste l’Esprit de Dieu. Afin de marcher avec un homme, j’aurais renoncé au témoignage de la vérité. J’aurais manqué à Dieu précisément dans ce qu’il m’a confié. Dieu agit dans l’Église par le témoignage de sa vérité. Il emploie des instruments et leur confie cette vérité. Dans l’accomplissement de cette tâche, ils devront agir avec charité, avec sagesse, donner du lait aux enfants, de la viande aux hommes faits, et, en général, mettre sur la conscience de l’Église les vérités par lesquelles Dieu agit sur elle ; en un mot, distribuer la nourriture au temps convenable. Mais, si je consens, avec ceux qui ne veulent que du lait, à ce que ceci devienne le terrain commun, le terme, la condition de la communion, je me prive de ma liberté, d’une liberté qui est un devoir devant Dieu. C’est un accord ; ce n’est pas une union.

Voilà ce qui se montre clairement dans la constitution de l’église évangélique de Genève. Elle ne chercha pas ce qui est selon la Parole en supportant les faibles ; mais, reconnaissant qu’il y a diversités de vues (et quiconque connaît Genève pourrait les désigner), elle les concilie de son mieux. Prenez le culte ; prenez la discipline. Ceux qui, certainement, avaient fait le plus de progrès sont les seuls qui fassent des concessions. Les prédicateurs (art. 20) conservent leur cène mensuelle, tandis qu’une autre classe de chrétiens se privent de la leur ce jour-là. Des prédicateurs, transformés en Anciens, conservent l’arbitraire en discipline ; ces autres abandonnent toute discipline. C’est-à-dire que, pour tomber d’accord, les principes sont abandonnés, et on arrange un système sur le pied le plus bas possible.

 

7.5        § [Pas de témoignage possible quand on fait un compromis habile sur la venue du Seigneur et le jugement des vivants, pour satisfaire à la fois ceux qui y croient et ceux qui n’y croient pas]

Cela même a lieu dans des choses plus graves.

Prenez la doctrine de la venue de Jésus, doctrine si solennellement importante dans ces derniers jours. Je reçois de tout mon cœur un chrétien qui ne la comprend pas. Comme chrétien, il est de Jésus, membre du corps de Christ, et je l’aime. En le recevant ainsi, ma liberté de ministère est intacte, et je l’exerce à son égard, comme aussi envers tous ; selon la sagesse que Dieu me donne en charité. Mais, si, au lieu de demeurer membre de l’Église, je m’arrange de manière à devenir membre d’une église en acceptant une transaction, bien qu’il n’y ait rien de faux en ce à quoi je souscris, je m’engage néanmoins à quelque chose. Je dis : voilà ma foi ; et, par-là, je perds la force et la vertu du témoignage que je dois rendre. Dans ce cas, l’unité dépend de ce que je suis membre du corps particulier auquel je m’attache, et cela en vertu de l’accord que je viens de faire. Quant à la venue de Jésus, les auteurs de la constitution de l’Église évangélique sont allés aussi loin qu’une transaction quant à la vérité pouvait le leur permettre. Les paragraphes 13 et 14 de leur Profession de foi, relatifs à la venue du Seigneur, sont rédigés de manière à pouvoir être signés par tout le monde. Le treizième pourrait suffire à quelqu’un qui croirait à la venue de Jésus avant les mille ans, sans blesser aucun de ceux qui s’y opposent. Il se compose de deux passages presque textuellement cités. Le quatorzième est plutôt fait pour ceux qui n’y croient pas, sans blesser toutefois ceux qui y croient. Chaque phrase en est vraie. Le paragraphe entier est habilement conçu pour la paix.

Est-ce ainsi qu’on arrange des vérités qui doivent être plus aiguës qu’une épée à deux tranchants ? Ma bouche serait fermée au sujet de la venue et de l’apparition de Christ, ou elle ne s’ouvrirait qu’en rendant ma conscience mauvaise ! Et, si je signe le paragraphe 14, et qu’un anti-millénaire le signe également, donnerons-nous à ces mots : « Il jugera le monde universel » un sens pareil, une portée égale ? Nullement ; et par notre silence nous nous trompons réciproquement. « Les méchants, ajoute ce paragraphe, iront aux peines éternelles, pendant que les justes jouiront de la vie éternelle ». Assurément ; mais lesquels ? quand (*) ? Nous signons l’un et l’autre pour marcher ensemble comme si nous étions d’accord, sachant très-bien que nous sommes loin de croire les mêmes choses. Cette habileté-là m’est pénible. Je crois que la venue de Jésus, le jugement du monde par Jésus, lorsqu’il paraîtra en gloire, du monde tel qu’il est, rempli d’hommes vivants, est une doctrine de la plus grande importance, qu’il faut annoncer d’une manière claire, suivie, et dans toute sa force ; et je ne puis me résoudre à torturer les phrases de manière à réduire le témoignage au niveau des expressions que peut supporter l’homme qui n’y croit pas. Ce n’est pas sentir l’importance de la doctrine devant Dieu. Et, si je ne sens pas son importance, je ne puis y rendre témoignage ; ce n’est pas la foi.

 

(*) Ce n’est pas sur les peines éternelles que je suscite un doute ni pour un instant ; mais je crois que le passage cité ici s’applique uniquement aux vivants, aux nations sur la terre, au jugement des vivants, vérité de toute importance pour la conscience de ceux qui s’attachent à ce monde, mais vérité que l’on a tout à fait négligée.

 

7.6        § [Il n’y a pas à produire l’union, mais à la reconnaître dans l’unité du corps de Christ. Chercher un moyen d’union en s’accordant sur une confession de foi commune est une faute]

Si vous insistez autant sur vos vues en des choses secondaires, me direz-vous, toute union est impossible.

Je vous répondrai premièrement qu’appeler cela secondaire, comme témoignage, signifie seulement que vous n’en sentez pas l’importance. Ce n’est pas mon cas. C’est précisément ce à quoi je ne veux pas prêter la main. Si vous êtes sur le fondement, qui est Christ, je vous reçois à bras ouverts dans l’unité du corps de Christ. Si vous parlez de nous accorder dans une profession commune, comme moyen d’union, votre observation est juste ; mais c’est ce qui me fait craindre votre principe d’union. Je sens l’épée de mon témoignage cassée dans ma main. Si vous aimez le Seigneur Jésus selon la vérité, vous êtes pour moi le bienvenu. Si vous niez quelque doctrine fondamentale, nous ne marchons pas ensemble ; mais faire des accommodements à l’égard de ce qui concerne mon témoignage, je ne le puis. La faute n’est pas d’avoir été ferme sur la vérité. J’honore mes frères de l’avoir été et de l’avoir avoué. Certes, je ne cherche pas l’union dans l’indifférence à l’erreur, ce qui est le grand péché du jour, et la forme que prend l’incrédulité dans notre siècle voué au matérialisme. La faute de ces frères, c’est d’avoir cherché un moyen d’union en s’accordant sur les termes d’une confession de foi commune. Peut-être n’en aviez-vous pas d’autre, par la raison que vous cherchez à produire l’union, au lieu de la reconnaître dans l’unité du corps de Christ.

Dans ce cas, ce que vous appelez église n’est qu’un arrangement d’hommes, auquel vous pourrez peut-être assurer le concours d’un certain nombre de signataires. Loin de moi de mettre l’Église de Christ sur un pareil pied. Si vous n’êtes pas de l’Église de Christ, je n’en reconnais aucune autre.

Je trouve donc, je ne dirai pas la vérité, parce que je ne crois pas que ce soit dans l’intention de mes frères, mais le témoignage à la vérité compromis dans une transaction sur la vérité destinée à obtenir l’union. Le seul principe vrai, c’est d’être membre du corps de Christ. Une fois unis, les soins les plus fidèles pour maintenir la vérité sont un devoir impérieux des disciples. L’Église le doit à Christ dans le soin qu’elle prend des brebis.

Je vois donc, dans l’œuvre dont nous venons de parler, un accord entre des hommes et non l’Église de Christ. Je trouve le témoignage à la vérité compromis, et un témoignage aux vérités les plus importantes.

 

8         Chapitre 8 – [Vérités capitales pour le temps actuel]

J’ajouterai ici trois points du plus haut intérêt, dans lesquels la vérité se développe, et par lesquels le Saint-Esprit rend témoignage aux âmes.

Avant de les signaler, je prierai mon lecteur de faire attention ici à une considération qui rendra la chose plus claire.

 

8.1        [Vérités de base du christianisme]

8.1.1        [Vérités de base admises même par la théologie romaine]

Certaines vérités sont à la base de tout le christianisme, en soi. D’autres tiennent à son efficace et à son accomplissement envers les hommes. Des troisièmes se rapportent au moyen de sa réception et même de sa communication. Ainsi, par exemple, nous trouvons au fondement même du christianisme l’existence d’un seul Dieu, la Trinité, la Divinité de Jésus, son humanité et des doctrines semblables. De même que l’existence d’un seul Dieu était la vérité fondamentale du judaïsme, et la vérité ne change pas, de même, la révélation du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et, en rapport avec cela, la révélation de la personne de Jésus, distinguent essentiellement le christianisme. La théologie romaine admet cela.

 

8.1.2        [Vérités concernant les relations de l’homme pécheur avec son Dieu. L’œuvre de Christ médiateur]

Mais il y a, en outre, une classe de vérités qui concernent les relations de l’homme pécheur avec son Dieu, avec Dieu ainsi révélé. Et, ici, l’œuvre de Christ médiateur se déploie dans toute son étendue.

À cet égard, je vois trois positions principales dans lesquelles Christ a été manifesté ou sera manifesté :

(1)   Dans l’œuvre infiniment précieuse de la croix ;

(2)   Dans la position de Jésus à la droite de Dieu, position à laquelle correspond la présence du Saint-Esprit ici-bas ;

(3)   Enfin, le retour de Jésus lui-même en gloire.

Ceci regarde l’efficace du christianisme pour établir des relations entre l’homme pécheur et Dieu, selon les conseils et l’amour de ce Dieu même contre lequel l’homme a péché, et pour placer le racheté dans la joie et dans la gloire qui lui sont destinées.

 

8.2        (1)§  [Vérité en rapport avec Christ manifesté dans l’œuvre de la croix]

8.2.1        [L’appropriation de l’œuvre de Christ est entièrement perdue pour le système catholico-romain]

C’est en quoi le système romain manque entièrement. Il attribue au pécheur non pas l’œuvre (au sujet de laquelle il est historiquement dans la vérité), mais l’appropriation de l’efficace de l’œuvre que Christ a accomplie ; appropriation qu’il dit avoir lieu soit par les sacrements, ce qui a pour résultat d’établir le clergé dans une position médiatoriale et, en conséquence, nécessaire à l’âme ; soit par les œuvres, de manière à nier la grâce et l’état de ruine où l’homme se trouve, à le placer sous la frayeur de la loi, et à le faire dépendre du prêtre et non pas de Dieu, auquel, Être sévère qui exige le dernier quadrain, son cœur n’est pas attiré, et de la présence duquel sa conscience non-purifiée le chasse.

 

8.2.2        [La Réformation a fait briller le témoignage de la grâce de Dieu]

Oh ! que la grâce et la vérité qui sont venues par Jésus-Christ sont précieuses à nos âmes ! Que ne devons-nous pas à notre Dieu ! En contraste avec ces ténèbres, la Réformation parait et brille dans tout son éclat, qui est l’éclat du témoignage de la grâce de Dieu. Et, comme témoignage de la grâce de Dieu, elle a établi avec une clarté réjouissante ce fondement de grâce qui est en même temps celui de l’œuvre de Christ, sur lequel les relations du pécheur avec Dieu ont été établies par Dieu lui-même.

En disant cela, je n’ai pas besoin d’ajouter que j’estime cette œuvre au plus haut degré. Un pauvre pécheur, dont l’âme dépend de cette œuvre et de cette grâce, et qui, en les connaissant, en en jouissant, a appris à aimer la gloire de Dieu et les âmes prêtes à périr dont il est environné, ne peut qu’estimer cette œuvre.

D’autres considérations, sans lesquelles le prix de cette œuvre aurait été de nouveau annulé, viennent à l’appui de celle que nous venons de présenter.

 

8.2.3        [La Réformation a fait reposer l’assurance du pécheur quant à la grâce de Dieu sur le témoignage de Dieu, sur Sa Parole]

La Réformation a fait reposer la certitude de ma connaissance de cette vérité, et la foi que j’ai en elle, sur le témoignage de Dieu substitué à celui de l’homme. C’était une différence du tout au tout. Dieu remplace l’homme dans le salut et dans la connaissance de ce salut. La Parole de Dieu est le fondement de la foi dans son œuvre par la grâce du Saint-Esprit. Ce que je trouve dans la Réformation, ce n’est pas que l’esprit de l’homme ait été affranchi, quoique, en bien, cela ait été vrai ; ce n’est pas seulement qu’elle ait revendiqué pour l’homme le droit de lire la Parole, quoique vis-à-vis d’autres hommes cela soit aussi vrai. Ce qu’elle a revendiqué, ce sont les droits de Dieu, la grâce de Dieu : le beau droit de Dieu de sauver le pécheur dans son amour, précieux salut dont Jésus doit avoir la gloire ; le droit de Dieu de communiquer au pécheur le témoignage de sa grâce, et de l’en assurer lui-même par la Parole qu’il lui avait donnée, révélation de la grâce de Dieu et, par là-même, règle et fondement inébranlable et précieux de la foi de l’homme. Qui osera dire, non à l’homme : Tu ne l’auras pas ; mais à Dieu : Tu n’as pas le droit de la donner, de la communiquer toi-même à ton serviteur (*) ?

 

(*) Il est évident que, si j’envoie des ordres à mes serviteurs, et que quelqu’un les empêche de les recevoir, il empiète moins sur les droits des serviteurs que sur les miens. Il en est de même quant à la Parole de Dieu, que Dieu a envoyée à son Église. Argument que l’on a trop oublié dans la controverse sur le droit des fidèles à lire la Bible.

 

Mettre ces choses au grand jour, voilà la belle œuvre de la Réformation. Nous en bénissons toujours Dieu.

 

8.2.4        [Au travers des bouleversements du temps, le Seigneur parle par sa Parole et veut faire connaître des vérités supplémentaires à celles de la Réformation]

Mais il ne faut pas raccourcir son bras, et dire : Tu as tout fait. Celui dont la grâce nous a donné la Réformation est le Dieu vivant. Le Seigneur, dont l’œuvre faisait, pour les instruments que Dieu avait suscités, le sujet de leur témoignage, nourrit et chérit encore son Église, et la purifie par la Parole. Ne nous dit-il rien maintenant ? Les siens, qui ont des oreilles, n’entendent-ils rien au milieu des orages qui éclatent, et qui annoncent à ceux qui sont cachés dans le Rocher des siècles que l’Éternel sort de son lieu ? [És. 26:4,21]. Ou la frayeur de ces hérauts de sa puissance les empêche-t-elle d’entendre la voix douce et subtile qui parle au cœur des siens ? [1 Rois 19]. Nous sommes cachés en Jésus, mes frères. Les vents impétueux et les tremblements qui annoncent l’Éternel ne nous effraient pas, et n’atteignent ni notre sûreté ni notre paix. Nous connaissons Celui qu’ils ne font qu’annoncer ; et, tout en l’annonçant, et même solennellement, ce ne sont pas les choses qui, pour le cœur de celui qui le connaît, ont la puissance de sa voix. C’est sa Parole, sa Parole communiquée à nos cœurs par la puissance de son Esprit.

Eh bien ! mes frères, je crois que sa voix nous parle.

Le Seigneur veut, je crois, que, fût-ce humiliant pour nous, nos cœurs prennent connaissance d’autres vérités, aussi bien que de celles que la Réformation a mises en évidence, vérités qui confirment celles-ci.

 

8.2.5        [Le Seigneur parle de son Église et de son retour]

Il nous parle de son Église.

Il nous parle du retour de son Fils Jésus du ciel.

Son Église en a besoin.

Tout se remue. Tout, dans le monde, se soulève par cette force intérieure qui, agissant comme du centre du monde moral de l’homme, ébranle et secoue toute la surface, dont l’agitation inaccoutumée effraie ceux qui y marchent, à la pensée du tremblement qui va suivre.

Qu’y a-t-il de solide, d’immuable ?

L’Église de Dieu, parce que Christ l’aime.

Il ne s’agit pas du salut simplement. Sans le salut, évidemment on ne peut rien avoir d’autre. Mais, au milieu des agitations du monde et des flots des peuples, que Dieu ne fait que brider pour un moment, où sont la paix, le devoir, le cercle d’affections , où sont ces « leurs » auprès desquels les Apôtres mêmes se rendaient dans les agitations et les peines qu’ils essuyaient au milieu d’un peuple incrédule, et qui, à sa propre ruine, se remuait contre Dieu ?

C’est l’Église.

C’est Dieu, me direz-vous.

Sans doute. Mais vers quoi Dieu dirige-t-il les cœurs, les pensées, l’affection de celui qui est près de Lui par la foi ? C’est vers l’Église. Voilà ce qui lui est cher dans le monde. Si, dans sa grâce, il cherche les pauvres pécheurs, c’est l’Église qui doit les recueillir.

 

8.3        (2)§  [Vérités en rapport avec Christ à la droite de Dieu (et le Saint Esprit ici-bas)

8.3.1        [Christ, à la droite de Dieu, rassemble l’Église sur la terre par le Saint-Esprit qu’il a envoyé d’en haut]

Où est-elle ?

C’est ici ce qui répond à la seconde vérité dont j’ai parlé à l’égard de Christ.

Pendant que Christ demeure à la droite de Dieu, jusqu’à ce que l’Éternel mette ses ennemis pour marchepied de ses pieds, le Saint-Esprit, qui a été envoyé d’en haut lorsque Jésus est monté, Lui, auprès du Père, demeure ici-bas témoin de la rédemption des siens, et puissance de leur rassemblement en un corps, du rassemblement de l’Église qui est le corps de Celui qui, comme sa tête, est assis à la droite de Dieu. C’est-à-dire que, de même que Christ sur la croix a accompli la rédemption, Christ, à la droite de Dieu, rassemble l’Église sur la terre par le Saint-Esprit qu’il a envoyé d’en haut de la part de son Père.

Cette dernière vérité, la Réformation ne l’a ni mise en avant, ni développée.

 

8.3.2        [La Réformation a développé des Églises nationales, groupées géographiquement]

Elle admettait sans doute, comme une vérité orthodoxe, que le Saint-Esprit était descendu le jour de la Pentecôte. Mais elle a institué des églises nationales, des églises de Saxe, de Hesse, d’Angleterre, etc., c’est-à-dire, des nations groupées géographiquement en églises, et comme telles organisées en rapport avec l’état et soumises à sa puissance, ayant leurs confessions de foi selon la lumière que leurs directeurs avaient su acquérir.

Voilà, en fait d’églises, ce que la Réformation a produit.

On ne s’en contente plus.

 

8.3.3        [La bonne référence est la Parole de Dieu. La Réformation se caractérisait par l’obéissance à cette Parole]

Pourquoi donc en établir, en leur donnant pour fondement ce que la Parole enseigne quant au salut, au lieu de considérer ce qu’elle dit sur le sujet qui nous occupe ?

Qui est-ce qui, en établissant des églises libres, s’est demandé : Que dit à ce sujet la Parole de Dieu ?

Mes frères, ce n’est-pas ainsi que l’on agissait à l’époque de la Réformation. Au milieu de difficultés et de combats bien autrement graves que ce dont nous sommes maintenant entourés, on regardait à la Parole de Dieu. Les Réformateurs étaient des hommes de foi. Quant aux difficultés, Dieu leur suffisait. Quant à la marche, la Parole les dirigeait. Ils osaient obéir, parce qu’ils comptaient sur Dieu pour leur force et leur protection dans le chemin de l’obéissance.

Pourquoi ne pas les imiter en cela ?

Cela peut nous conduire à l’humiliation, à une marche en apparence peu glorieuse, de peu d’éclat, qui parait ne rien valoir. Mais, si Dieu y conduit, ce sera assurément le chemin où il bénira son peuple.

 

8.3.4        [Les révolutions ont produit les églises libres. Les règlements humains et les restrictions géographiques s’opposent à l’unité du corps de Christ formée par le Saint Esprit]

Permettez-moi de vous rappeler encore le passage d’Ésaïe 22:7-11.

Vous pensez à établir une église. Avez-vous pensé à ce qu’est l’Église de Dieu selon la Parole, Parole de Celui qui l’avait faite et façonnée dès longtemps ? Vous reconnaissez qu’à cet égard la Réformation n’a pas fait ce que Dieu a voulu, selon ce qui en est révélé dans le Nouveau Testament. Que, dit-elle donc, la Parole ? Et, tandis que les révolutions ont produit des églises libres, n’est-il pas vrai que la Parole de Dieu parle d’une Église formée par la présence du Saint-Esprit descendu d’en haut, qui mettait cette Église, corps unique de Christ en relation avec son Chef assis à la droite de Dieu ? Et, sauf les églises de tel ou tel endroit, églises dont l’unité locale est également constatée et dans les Épîtres et dans l’Apocalypse, la Parole de Dieu ne mentionne pas d’autre église. Des églises qui trouvassent leurs limites dans la circonscription des pays qu’habitaient ceux dont elles étaient composées, voilà ce à quoi la Parole ne fait pas la moindre allusion. De telles églises ne peuvent, ni de fait, ni d’affection, être l’épouse de Christ. Elles sont nécessairement en rapport avec le pays où elles se trouvent. L’unité du corps de Christ est perdue pour elles. Les règlements, la marche, les jointures, la machine tout entière, tout, en un mot, dans leurs opérations, est nécessairement restreint aux limites du pays où l’église se trouve. Ce ne peuvent être ni les fonctions ni les règlements du corps de Christ. Ceux-ci, on les met de côté. Je ne parle pas de l’uniformité des détails, mais de tout ce qui forme le corps, les ressorts moraux de l’institution. Le corps de Christ n’est pas reconnu. L’unité de l’Église devient une unité toute différente de celle du corps ; le corps devient un tout autre corps que celui de Christ. C’est un corps qui agit d’une manière indépendante, un corps autonome, qui ne relève que de lui-même. La conséquence en est que le Saint-Esprit, qui donne au corps de Christ son unité, n’est pas reconnu dans cette fonction. Tout ce qui tient à sa présence comme descendu du ciel pour unir le corps à son Chef, et pour agir dans les membres pour l’accroissement du corps, est perdu dans sa réalité. Peut-être agit-il malgré ce qu’on appelle l’Église ; mais il n’agit pas par ce qui en est le système. Le Saint-Esprit ne peut reconnaître un corps qu’il n’a pas formé, mais que l’homme a formé. Et former un tel corps, c’est ne pas reconnaître celui que le Saint-Esprit a uni au Chef. On ne peut dire que ces églises soient le corps de Christ. La Parole et l’Esprit, ne reconnaissent pas d’autre église que celle qui l’est. (Je ne parle pas d’une assemblée locale).

 

8.3.5        [L’Église, corps de Christ : un témoignage de la puissance de la rédemption + de la présence du Saint-Esprit + de la gloire de Christ sur le trône du Père + Elle est la demeure de Dieu sur la terre, l’épouse de Christ]

Je préfère présenter à mes frères cette vérité comme un objet de foi que comme une difficulté qui, quant à ses relations avec eux, obstrue le chemin de celui qui se soumet à la Parole. La Réformation, l’église historique ne peut pas nous mettre en possession de cette vérité qu’elle ne reconnait pas. Une Église invisible ne répond pas aux besoins du cœur que cette vérité fait naitre. L’Église, corps de Christ, est, dans le monde, le témoignage de la puissance de la rédemption, de la présence du Saint-Esprit, qui peut demeurer au milieu des croyants, parce qu’ils sont agréables en Celui qui comparait devant Dieu pour eux ; le témoignage aussi de la gloire de Christ sur le trône du Père. L’Église est la demeure de Dieu sur la terre, comme le temple l’a été avant la venue de Jésus. Elle est l’épouse de Christ.

 

8.3.6        [Une partie importante de la vie chrétienne et de l’amour de Jésus se rattache à la vérité au sujet de l’Église]

Soyez assurés, mes frères, qu’il y a des affections spirituelles, des relations connues et senties avec le Seigneur Jésus, auxquelles la Parole attache un grand prix, et desquelles jaillit une lumière précieuse, qui fait briller l’amour de Jésus d’une manière toute particulière, et révèle l’objet de son affection et de ses soins ; qu’il y a, en un mot, toute une partie de la vie chrétienne et de l’amour de Jésus rattachée à cette vérité, à laquelle celui qui en a connaissance par la foi ne pourrait consentir à renoncer. En le faisant, il pécherait contre Christ. Je parle de ce que Christ nourrit et chérit comme sa propre chair, de ce qu’IL sanctifie et purifie par la Parole. Voulez-vous que nous l’oubliions ? Faudrait-il nous soustraire à l’influence de cette vérité qui nous en parle ? Je parle de l’Église de Dieu.

 

8.3.7        [S’occuper de ce que Dieu a créé l’Église pour être cohéritière de son Fils, épouse de l’Agneau, dans la gloire. Mais son rassemblement s’opère sur la terre par le Saint-Esprit descendu du ciel et elle est une avec Christ en haut]

Pourquoi faire une église, au lieu de penser à celle que Dieu a créée pour être les prémices de toutes ses créatures, la cohéritière de son Fils, l’épouse de l’agneau ?

C’est là ce qu’elle sera dans la gloire, me direz-vous.

Cela est vrai. Mais son rassemblement s’opère sur la terre, et son unité découle de la présence et du baptême du Saint-Esprit descendu du ciel. Elle est une par le Saint-Esprit sur la terre aussi bien qu’avec Christ en haut.

Et c’est ce qui me conduit à la troisième vérité que j’ai annoncée, vérité que la Réformation a entièrement laissée de côté et a même laissé tomber dans les mains des fanatiques, dans les mains de l’Ennemi. Je parle du retour du Seigneur.

 

8.4        (3)§  [Troisième vérité dont parle la Parole et laissée de côté par la Réformation : Le retour du Seigneur]

8.4.1        [Le retour du Seigneur, une vérité qui doit agir puissamment sur la conscience et sur le cœur, et non une vérité lointaine étrangère à la vie de chaque jour]

La Parole de Dieu ne nous présente-t-elle pas le retour du Seigneur comme une vérité qui doit agir puissamment sur la conscience et sur le cœur ? Et les circonstances actuelles ne sont-elles pas un appel sérieux du Seigneur à y penser ? La vérité que le Seigneur va venir bientôt juger le monde habitable, exécuter son jugement en convaincant tous les méchants de toutes leurs méchantes actions qu’ils ont méchamment commises contre Lui, et de toutes les paroles injurieuses que les pécheurs impies ont proférées contre Lui, cette vérité si solennelle doit-elle être reléguée à l’horizon du témoignage de Dieu comme un objet perdu à distance ? La pensée douce et précieuse que Jésus va bientôt venir recevoir les siens, recueillir son épouse auprès de Lui, et l’abriter dans la maison du Père, afin qu’elle y jouisse éternellement de l’amour qui l’a sauvée, doit-elle rester étrangère à la vie de chaque jour de son pèlerinage ici-bas loin de son Époux ?

Voyons si la Parole de Dieu ne présente pas, soit au monde, soit à l’Église, la venue de Jésus, sous ces deux points de vue, comme un motif continuel.

 

8.4.1.1       [La venue du Seigneur, un motif continuel pour produire du sérieux dans les âmes du monde (jugement des vivants)]

Je ne parle ni du grand trône blanc, ni du jugement des morts. Quand il est assis sur le grand trône blanc, Jésus ne vient pas. Les morts seuls se tiennent devant Lui. Le ciel et la terre s’enfuient de devant sa face. « Il ne se trouve plus de lieu pour eux ». Jésus, siégeant sur le tribunal de Dieu, fait comparaître devant lui les morts. Jour solennel, dont les conséquences éternelles sont de nature à produire toujours du sérieux dans nos âmes !

Tout cela n’est pas la venue de Jésus, de Celui qui doit venir de la même manière qu’il s’en est allé.

Je parle du jugement des vivants, de ce monde que nous habitons. Qu’en dit le Seigneur ? « Comme l’éclair brille de l’un des côtés de dessous le ciel, et reluit jusqu’à l’autre qui est sous le ciel, tel sera aussi le Fils de l’Homme en son jour » [Luc 17:24]. … « Et comme il arriva aux jours de Noé, il en arrivera de même aux jours du Fils de l’Homme ; on mangeait et on buvait, on prenait et on donnait des femmes en mariage, jusqu’au jour que Noé entra dans l’arche, et le déluge vint qui les fit tous périr. Il arriva aussi la même chose aux jours de Lot. On mangeait, on buvait, on achetait, on vendait, on plantait et on bâtissait ; mais, au jour que Lot sortit de Sodome, il plut du ciel du feu et du soufre qui les fit tous périr. IL EN SERA de même au jour que le Fils de l’Homme sera manifesté » [Luc 17:26-30].

« Or, mes frères, touchant le temps et le moment, vous n’avez pas besoin qu’on vous en écrive, puisque vous savez vous-mêmes très-bien que le jour du Seigneur viendra comme un larron en la nuit ; car, lorsqu’ils diront paix et sûreté, alors il leur surviendra une subite destruction, comme le travail à celle qui est enceinte, et ils n’échapperont pas » [1 Thes. 5:1-3].

« Voici, il vient avec les nuées, et tout œil le verra, et ceux même qui l’ont percé ; et toutes les tribus de la terre se lamenteront devant Lui. Oui. Amen » [Apoc. 1:7].

« Lorsque le Seigneur Jésus sera révélé du ciel avec les anges de sa puissance, avec des flammes de feu, exerçant la vengeance contre ceux qui ne connaissent pas Dieu, et contre ceux qui n’obéissent pas à l’Évangile de notre Seigneur Jésus-Christ, lesquels seront punis d’une peine éternelle par la présence du Seigneur, et par la gloire de sa force, quand il viendra pour être glorifié en ce jour-là dans ses saints, et pour être rendu admirable en tous ceux qui croient » [2 Thes. 1:7-10].

Voilà quelques témoignages, et la Parole en est pleine, concernant la venue de Jésus pour juger les vivants. Car hélas ! « Les rois de la terre seront rassemblés par des esprits impurs pour la grande journée du Dieu Tout-Puissant. Ils feront la guerre à l’Agneau et l’Agneau les vaincra, car il est le Roi des Rois et le Seigneur des Seigneurs » [Apoc. 16:13-14 et 17:14].

« Et le Dieu Fort, le Dieu, l’Éternel parlera et il appellera toute la terre, depuis le soleil levant jusqu’au soleil couchant » (Ps. 50).

« Et Celui qui est appelé la Parole de Dieu foulera la cuve du vin de l’indignation et de la colère du Tout-Puissant » (Apoc. 19). Et cela, lorsque la moisson sera prête pour la faucille et que les raisins de la vigne de la terre seront mûrs [Apoc. 14:15,18].

Dieu est plein de bonté et de patience. Il ne frappe que lorsque l’iniquité est au comble. Il cherche encore les âmes pendant que c’est encore le temps favorable, le jour du salut. Personne ne connaît le jour « où il se lèvera pour le dégât ». Mais qui dira que la moisson ne mûrit pas pour la faucille, et que les grappes de la vigne de la terre ne grossissent pas pour le jour de sa colère ?

Ce jour ne surprendra pas comme un larron ceux qui sont les enfants du jour, les enfants de lumière, mais c’est parce qu’ils sont du jour. Instruits d’avance des jugements de Dieu, ils appartiennent à Celui qui doit exécuter le jugement, et non au monde sur lequel les jugements fondront. Ils attendent du ciel Celui qui les a sauvés par sa grâce, qui les délivre de la colère à venir. Rachetés par son sang, Celui qui les a rachetés leur est cher, et ils attendent pour la gloire Celui qui par sa grâce, les en a rendus capables.

 

8.4.1.2       [La venue du Seigneur, un motif continuel pour la marche du croyant (conversion, joie, communion, sainteté, consolation pour deuil, etc.)]

Or, voyons si, d’après la Parole, cette pensée ne se lie pas à toutes les affections, n’influe pas sur toute la marche, et ne domine pas toutes les pensées de celui que l’amour de Jésus a introduit dans le chemin, dans pèlerinage de la foi.

Je ne prétends pas vous présenter ici les preuves de la doctrine. Quoique l’étude des enseignements de la Parole à ce sujet soit du plus haut intérêt, mon but, mes frères, est de vous faire voir que la vérité dont nous parlons, que l’attente de la venue de Jésus se rattache à toute la marche chrétienne sous tous les rapports, et que, par conséquent, elle est une des vérités les plus pratiques.

S’agit-il de la conversion ? Ils avaient été convertis pour attendre du ciel son Fils Jésus (1 Thess. 1).

S’agit-il de la joie de l’œuvre et de la communion des saints ? « Quelle est notre espérance, ou notre joie, ou notre couronne de gloire ? N’est-ce pas vous qui l’êtes devant notre Seigneur Jésus-Christ au jour de son avènement ? » (1 Thess.2).

S’agit-il de la sainteté ? C’est « pour affermir vos cœurs sans reproche en sainteté devant Dieu, qui est notre Père, à la venue de notre Seigneur Jésus-Christ, accompagné de tous ses saints » (1 Thess. 3).

Et ce qui peut-être frappera davantage l’esprit de quelques-uns, et qui démontrera jusqu’à quel point l’Église s’est éloignée des habitudes de penser que la Bible inspire, c’est qu’au moment où les amis affligés d’un chrétien qui vient de déloger entourent son lit, l’Apôtre les console par la pensée que Christ le ramènera.

« Or, mes frères, je ne veux pas que vous ignoriez ce qui regarde ceux qui dorment, afin que vous ne soyez pas attristés comme les autres qui n’ont point d’espérance. Car, si nous croyons que Jésus est mort et qu’il est ressuscité, de même aussi ceux qui dorment en Jésus, Dieu les ramènera avec Lui. Car nous vous disons ceci par la Parole du Seigneur. C’est que nous qui vivrons, et qui resterons à la venue du Seigneur, nous ne devancerons pas ceux qui dorment. Car le Seigneur lui-même, avec un cri d’exhortation et une voix d’archange, et avec la trompette de Dieu, descendra du ciel ; et ceux qui seront morts en Christ ressusciteront premièrement ; puis nous qui vivrons, et qui resterons, nous serons enlevés ensemble avec eux au-devant du Seigneur dans l’air, et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur. C’est pourquoi, consolez-vous l’un l’autre par ces paroles ».

Si l’on consolait ainsi maintenant, à l’occasion d’un mort, quel en serait l’effet sur la plupart des chrétiens de nos jours ?

S’agit-il encore d’une vie irréprochable à tous égards ?

« Or, le Dieu de paix vous sanctifie entièrement, et fasse que l’esprit entier et l’âme et le corps soient conservés sans reproche en la venue de notre Seigneur Jésus-Christ ! » (1 Thess. 5).

Au milieu de très-fortes persécutions, la pensée de la présence de Jésus intervenait comme le temps du repos.

« Du relâche, dit l’Apôtre, à vous qui êtes affligés lorsque le Seigneur sera révélé avec les anges de sa puissance ». Comment une telle pensée pourrait-elle offrir à l’âme de la consolation, si cette attente de Jésus n’était pas une attente réelle et présente ?

S’agit-il des circonstances pénibles de la vie et de la patience sous l’oppression ? La même espérance consolante est présentée au cœur de celui qui souffre. « Or donc, mes frères, attendez patiemment jusqu’à la venue du Seigneur.... Vous donc aussi, attendez patiemment et affermissez vos cœurs, car la venue du Seigneur est proche.... Le juge se tient à la porte ».

S’agit-il de la responsabilité ? « Je t’ordonne devant Dieu, dit Paul à Timothée, ... de garder ce commandement en te conservant sans tache et irrépréhensible jusqu’à l’apparition de notre Seigneur Jésus Christ ».

Et, comme motif, comme mesure et caractère de progrès spirituel, nous savons que, lorsque Christ paraîtra, nous Lui serons semblables ; car nous le verrons tel qu’Il est. Et quiconque a cette espérance en Lui se purifiera comme Lui aussi est pur.

 

8.4.2        [Effets mauvais et graves de l’oubli du retour du Seigneur]

« Vous, dit le Seigneur, comme des hommes qui attendent leur maître, » etc. C’est là le caractère que le Seigneur veut que ses disciples revêtent. Qu’est-ce, au contraire, qui marque l’iniquité de ceux qui tiennent la place de serviteurs, iniquité qui amène le retranchement ? Si c’est le langage du méchant serviteur que de dire : « mon maître tarde à venir », l’Église de Dieu n’a-t-elle rien à confesser de pareil dans son histoire ?

Quel est le caractère que la profession du christianisme a pris dès le commencement, caractère que cette profession a perdu, et que les chrétiens sont appelés à revêtir de nouveau ? Quelle est la proclamation qui les réveille ? La voici.

Le royaume de Dieu est semblable à dix vierges qui sortirent à la rencontre de l’époux. Toutes, hélas ! se sont endormies. Pendant que l’époux tardait, les sages, non moins que les folles, ont perdu la pensée de sa prochaine arrivée.

Qu’est-ce qui les réveille, les place dans une position convenable, et met de côté celles qui n’ont point d’huile ? À minuit, un cri se fait entendre : « Voici l’époux qui vient, sortez au-devant de lui ! » Alors toutes les vierges se lèvent. Et c’est là ce qui a mis à l’épreuve l’état des âmes. Pourrait-il y avoir quelque chose d’une évidence plus solennelle pour mettre en relief la vérité qui, au commencement, caractérisait l’Église, convertie pour attendre du ciel le Fils de Dieu ; pour montrer comment le sommeil spirituel s’est emparé d’elle, et quel moyen Dieu emploie pour la réveiller ?

 

8.4.3        [La venue du Seigneur : Une vérité qui fait vibrer le cœur]

Si le Seigneur veut consoler les disciples qu’il va quitter, « je m’en vais, leur dit-il, préparer le lieu et, si je prépare le lieu, je reviendrai, et je vous prendrai à moi, afin que là où je suis vous y soyez aussi ».

Si les anges envoyés du ciel doivent donner une direction saine et juste aux pensées des disciples, qui regardaient toujours en haut après celui qui échappait à leur vue, ils leur annoncent son retour en disant : « Ce même Jésus, que vous avez vu monter dans le ciel, en reviendra de la même manière que vous l’y avez vu monter ».

S’agit-il, enfin, des affections les plus intimes que produise la révélation de Jésus, étoile matinière du beau jour qui va arriver, « l’Esprit et l’Épouse disent : Viens ». Et Jésus répond : « Oui, je viens bientôt. Amen ».

Cette voix solennelle clôt toute la Parole, par la réponse du cœur du fidèle mû par le Saint-Esprit : « Oui, Seigneur Jésus, viens ».

Voilà ce que le Saint-Esprit a laissé vibrer dans le cœur de l’Église jusqu’à ce que l’Époux vienne.

 

8.4.4        [En bref : Venue du Seigneur : menace pour le monde, elle se lie à toutes les pensées, les affections, les motifs des fidèles. Cette vérité se lie à toute la vie chrétienne]

En un mot, si la venue du Fils de l’Homme menace le monde, qui l’a rejeté, du juste et terrible jugement du Dieu que l’incrédulité connaîtra dans sa colère, Lui qu’elle veut ignorer et repousser dans sa grâce, malgré tous les témoignages qui lui auront été accordés (ainsi qu’il est écrit : « Est-il fait grâce au méchant, il n’en apprend pas la justice. Ô Éternel, ta main est-elle haut élevée, ils ne l’apercevront point ; mais ils l’apercevront » [És. 26:10, 11]) ; si, dis-je, l’apparition du Fils de l’Homme sonne l’heure de l’orgueil de  de la terre, c’est, d’un autre côté, à la venue du Fils de Dieu que se lient toutes les pensées, toutes les affections, tous les motifs des fidèles. L’attente de cette venue caractérisait et formait toute la vie chrétienne. Joie, gloire, sainteté, repos, consolation, patience, tout, dans le christianisme du Nouveau Testament, se rattache à la venue du Seigneur, dont l’humiliation et l’œuvre avaient posé le fondement d’une espérance aussi glorieuse. Cette espérance couronnait toute la vie chrétienne, et séparait du monde l’Église comme épouse de Jésus pour être entièrement à Lui, son Époux céleste.

Voilà, mes frères, non des preuves de la vérité de cette doctrine ; ce n’est pas ce que j’ai cherché à vous présenter ici ; mais des preuves de la manière dont cette vérité se lie à toute la vie chrétienne.

Veut-on un résumé de la doctrine chrétienne ? Prenez Hébr. 9:27 : « Comme il est ordonné aux hommes de mourir une fois, et après cela le jugement, ainsi Christ est mort une fois pour porter les péchés de plusieurs ; et, à ceux qui l’attendent, il paraîtra la seconde fois sans péché, à salut ». Ou, pour nous servir d’un autre passage : « la grâce de Dieu salutaire (*) à tous les hommes nous a été manifestée, nous enseignant qu’en reniant les convoitises mondaines, nous vivions sobrement, justement et pieusement dans la vie présente, attendant cette bienheureuse espérance et apparition glorieuse de notre grand Dieu et Sauveur- Jésus-Christ » [Tite 2].

 

(*) Ou, la grâce de Dieu qui apporte le salut a paru à tous les hommes.

 

8.5        [Conclusion : les deux vérités de l’Église corps formé par le Saint Esprit et du retour de Jésus, méconnues par la Réformation, sont essentielles à la gloire de Jésus et à l’instruction de l’Église dans ses circonstances]

L’apparition de la grâce qui sauve fraie le chemin à l’apparition de la gloire.

Voilà donc deux grandes vérités : l’Église, corps formé sur la terre par la présence du Saint-Esprit descendu du ciel, et le retour de Jésus pour recevoir son épouse auprès de Lui, et revenir avec elle pour juger le monde ; deux vérités essentielles à la gloire de Jésus et à l’instruction de l’Église dans les circonstances où elle se trouve, vérités que la Réformation n’a pas mises en lumière, et qui répondent aux besoins du moment, à l’œuvre que le Saint-Esprit accomplit, il me semble, en conservant ce qui est le fondement de toutes les vérités, l’œuvre de Jésus sur la croix et la dignité de sa divine personne.

 

9         Chapitre 9 – [Peut-on baser une église sur une constitution ? Revenir aux vérités de la Réformation ne suffit pas]

9.1        [La situation est qu’on cherche des solutions de remplacement aux institutions de la Réformation qui s’en vont]

Les institutions que la Réformation avait établies, même considérées comme des effets de l’œuvre de Dieu, s’en vont. Qu’y a-t-il donc à faire ? Voilà la question.

En ramenant les âmes à la Réformation, et à rien de plus, répond-on aux besoins que, dans ce moment, le Saint-Esprit produit en elles, c’est-à-dire, aux intentions de sa grâce ?

Je ne le crois pas.

Que vous ayez des motifs suffisants pour vous séparer d’un système, qui met la vraie doctrine de la gloire de Jésus au même niveau que la négation de cette doctrine, j’en conviens. Mais il ne s’agit pas de cela. Ce dont il s’agit, c’est de constituer les églises réformées de France, en l’église réformée de France. Ce n’est pas, faites-y attention, ce qu’ont été les symboles de l’Église primitive, tout inefficaces qu’ils aient été. À cette époque-là, l’Église était constituée, et elle professait sa foi à elle, en rejetant certaines erreurs ; car, en effet, les symboles sont, au fond, toujours des négations, c’est-à-dire, des vérités présentées de manière à repousser certaines erreurs. Mais, ici, ce n’est pas ce que vous faites. Par une profession de foi, vous voulez constituer, ou si vous l’aimez mieux, vous engagez les églises à se constituer sur des bases données, en avouant que vous ne copiez pas même les institutions de la Réformation, et vous attendez, désir en soi saint et excellent, que tous les chrétiens se réunissent à vous.

La question devient donc grave.

 

9.2        [Peut-on rallier les enfants de Dieu par une profession de foi basée sur la négation de l’erreur ?]

Le signe de ralliement que vous proposez, suffit-il pour rassembler les chrétiens ? Un grand nombre de chrétiens, qui ont en partage avec vous et la même foi, et les principes de la Réformation, demeurent attachés aux institutions que la Réformation a créées. Ils ont tort, selon vous ; mais ils le font. Vous adoptez la vérité dans la mesure où ils la professent ; seulement, vous voulez l’exposer de manière à exclure ceux qui la nient ; c’est-à-dire que vous faites de cette négation d’erreur le fondement de votre nouveau système.

La vérité, dites-vous, est un principe de vie. Je le crois.

Les églises, pensez-vous, ont vécu parce qu’elles avaient la foi. C’est un peu manquer à l’histoire. Mais soit. La mesure de vérité que la Réformation a possédée a produit les institutions que vous abandonnez. Vous ne prenez pas un symbole comme drapeau de ralliement, vous vous bornez à ajouter une formule destinée à exclure les hérétiques français, s’ils sont de bonne foi. Cette négation suffit-elle, comme fondement de l’œuvre de Dieu, qui seule peut rallier ses enfants ? Car, à part cela on trouvera encore la même vérité dans le système ancien, et, à côté d’elle, l’erreur qu’on évite pour soi-même.

Quel serait donc l’effet de votre marche ? Une division ; la formation de deux camps ; non de deux camps, dont l’un soit réuni par la vérité, et l’autre, par l’erreur ; mais de deux camps dont l’un renferme vérité et erreur, avec les influences traditionnelles et les institutions du système ; l’autre, la vérité sans l’erreur, posant la séparation comme obligatoire, et puisant sa force dans cette séparation même.

Ce motif (motif qui agira, je n’en doute pas, sur un grand nombre de consciences droites) suffit-il à réunir tous les enfants de Dieu ? Car, tout en posant la saine doctrine au fond, la vérité en question est partielle.

Vous vous séparez de ceux qui ne veulent pas confesser leur foi. Sentant pour vous-mêmes l’obligation de le faire, vous professez la vôtre.

Chers frères, je vous respecte au fond de mon cœur. Je suis satisfait que votre but ait été la gloire du Seigneur. Mais que présentez-vous aux autres ? Quel signe de ralliement avez-vous qui, en principe, réunisse tous les chrétiens selon les besoins de l’Église, et les vérités éternelles qui répondent à ces besoins ? Vous reproduisez, tout au plus, les vérités fondamentales de la Réformation, vérités qui ont produit ce que vous venez de quitter ; vous les reproduisez développées de manière à faire une distinction claire entre vous et la triste négation de vérité, qui fait le symbole du camp que vous ne supportez plus. C’est-à-dire que, lorsqu’il s’agit de former quelque chose au-delà de la sphère du salut individuel, vous n’avez plus qu’un principe négatif, un principe qui vous sépare de ce qui existe déjà et qui le condamne. Plusieurs de ceux qui s’y trouvent possèdent le salut aussi bien que vous-mêmes, et par les mêmes vérités. Vous rassemblez des chrétiens en faisant de ces vérités un exposé tel qu’il sépare ceux qui l’adoptent de ceux qui ne reçoivent pas ces vérités.

En fait d’église, la Réformation n’a produit que ce que vous abandonnez. Ne possédant que les principes qui ont produit ce que vous abandonnez, que mettez-vous à la place de ce que vous quittez ? Une église de séparation, qui nie le genre de corporation dont elle possède le principe constitutif, et rien de plus. Car, tout en agissant par la puissance de la vérité qui sauve les âmes, la Réformation n’a produit, en fait d’église, que le corps dont vous ne voulez plus. Son résultat, en France, n’a pas même été la formation d’une église nationale, mais simplement celle d’un corps de professants. C’est là ce que vous êtes. Ce qui fait la différence, c’est la négation de l’indifférence à la vérité, et, pour le moment, la foi de ceux qui agissent.

 

9.3        [Une église de multitude est forcément indifférente à l’erreur. Nier l’erreur ne suffit pas à rassembler]

Est-ce que je vous blâme, mes frères, à l’égard de votre acte individuel ? Je vous approuve hautement. La seule chose qui me frappe, c’est que vous n’approuviez pas une confession de foi comme fondement de votre œuvre, et que vous la remplaciez par une profession de foi individuelle, exprimée de manière à répondre aux erreurs du jour. Mais d’abord on peut, dans ce cas, le faire sans se séparer, si ce n’est qu’individuellement qu’on le fait. Si c’est une inconséquence que de rester comme individu avec des personnes qui nient l’Évangile, parce que ce serait les sanctionner, il y a longtemps que vous auriez dû quitter. Votre affection pour le système vous y a retenus. Le continuerez-vous donc ce système multitudiniste ? Dans ce cas, vous serez bientôt de nouveau dans l’incrédulité. Le multitudinisne sans confession est bientôt l’indifférentisme. Si vous changez de système parce qu’il était mauvais, pourquoi y êtes-vous restés jusqu’à ce que la question des doctrines y fût tranchée ? Est-ce que je vous fais un reproche d’en être sortis maintenant ? Loin de là. C’était à mes yeux un devoir évident. Mais, cette considération à part et à part aussi le caractère de foi et l’énergie qui s’y sont manifestés, je cherche dans votre position des principes qui puissent servir de base au rassemblement des enfants de Dieu, et je doute qu’une foi qui ne s’élève qu’à une négation suffise pour cela. Pour cela, il faut quelque chose de plus que ce qui a suffi pour motiver votre sortie du corps mélangé dont vous ne faites heureusement plus partie.

 

9.4        [Besoin de l’énergie de l’Esprit de Dieu. Agir hâtivement sans changer les institutions qu’on abandonne et sans se différencier franchement quant à la doctrine, ne suffit pas à retenir les âmes]

Il me semble que votre position actuelle est droite et honorable, et que, si c’est un peu tard, Dieu au moins vous approuve maintenant. Mais êtes-vous par là-même dans une position qui vous rende possible de jeter les fondements du rassemblement des enfants de Dieu, de manière à répondre aux besoins de ces temps critiques ? Ou, en vous hâtant de le faire avec ce que vous possédez (ou plutôt avec ce que les églises de France possèdent, car vous sentez que vous ne le pouvez pas vous-mêmes), ne risquez-vous pas de le faire sur un fondement trop étroit, trop peu assis sur l’énergie de l’Esprit de Dieu, telle qu’il la déploie pour accomplir les desseins de la grâce de Dieu, pour accomplir son œuvre à Lui ? Je comprends que vous craigniez qu’en attendant les âmes ne se refroidissent.

L’énergie est bonne, mais elle ne se borne pas à poser des fondements, lorsqu’on les pose dans un moment où, tandis qu’on bâtit, il est à craindre que Dieu n’agisse en dehors de ce que l’on fait. Votre empressement fait voir que, pour maintenir la vérité et réunir les âmes, vous comptez encore sur les institutions que vous venez d’abandonner ; que la vérité que vous professez n’est pas assez distinctive pour retenir les âmes dans la position où vous voulez les garder, vu que d’autres personnes, qui ont cette vérité en commun avec vous, demeurent dans l’ancien système. C’est assez dire que la séparation formelle est le principe de réunion ; et, pour principe vital de votre nouvelle institution, vous n’avez que les vérités qui ont produit celle que vous abandonnez.

 

9.5        [La séparation, pas plus que l’affection pour la tradition, ne suffisent pas à rallier tous les enfants de Dieu par une obligation spirituelle. Il faut des vérités positives pour rassembler]

La séparation suffit-elle à servir de point de ralliement, et à réunir par une obligation spirituelle tous les enfants de Dieu ? Voilà la question. N’est-il pas vrai que votre projet compte sur l’affection traditionnelle des âmes pour les églises réformées de France ? Nous nous replaçons, dites-vous, sur ce terrain pour ramasser l’ancien drapeau. Mais vous partagez avec d’autres l’influence de ce sentiment.

La foi, qui compte sur Dieu, ne se hâte pas comme si la chose n’était pas dans ses mains.

Vous faites une église. Tâche sérieuse et solennelle ! Est-elle l’Église de Dieu ?

Vous désirez l’union sincèrement, et pour la gloire de Dieu. Je vous crois, mes frères. Mais qui est-ce qui peut poser des bases telles qu’elles embrassent les chrétiens ? Dieu seul.

Il faut non-seulement de la vérité, non-seulement des vérités exposées de manière à repousser ceux qui les nient ; il faut les vérités positives par lesquelles Dieu agit pour rassembler les siens selon les besoins actuels de l’Église. Parce que vous avez eu à lutter contre ceux qui les nient, vous croyez que les vérités précieuses émises du temps de la Réformation suffiront. Êtes-vous sûrs que vous soyez à la hauteur des pensées de Dieu, que vos vues embrassent toute la sphère dans laquelle l’énergie de son Esprit se manifeste ?

 

9.6        [Vouloir être à la hauteur des pensées de Dieu, est-ce une prétention orgueilleuse ou la simplicité de la foi ? Est-ce faire de l’opposition à une bonne ‘constitution’ ?]

Vous me direz que je suis un orgueilleux. Vous me demanderez si je prétends le faire. Non, mes frères. Mais je ne prétends pas faire, sur le papier, une constitution d’église qui réclame l’adhésion de tous les chrétiens, comme si elle était la sphère où cette énergie de l’Esprit de Dieu se manifeste. J’agis selon la mesure de foi que Dieu m’a donnée. Voilà tout. Faites de même. Dieu vous bénira ; et, à celui qui a plus, il lui sera donné.

Si vous ne prétendez pas pouvoir faire une constitution qui soit selon l’étendue des conseils de Dieu à l’égard de son Église dans le moment présent, faites-vous bien de songer à faire une constitution quelconque ? Feriez-vous bien de condamner tous ceux qui, ayant l’idée de quelque chose de plus, n’aiment pas à se limiter, ou plutôt à limiter Dieu à la mesure de ce qu’il vous a donné dans sa grâce en ce moment ? Ce qui est certain, c’est que vous ne pouvez pas la dépasser. Devriez-vous l’imposer comme borne ? Je ne parle pas, chers frères, pour vous faire de l’opposition, ni ne pense à vous en faire en ce que je viens de dire. Je sais quelles préventions existent. Je bénis Dieu de ce qu’il vous a donné à faire comme démarche individuelle. Je crois même très-possible que, votre démarche fidèle laissant sans excuse ceux qui restent unis au mal, la bénédiction les abandonne en grande partie quant aux vérités même qu’ils maintiennent.

 

9.7        [Ne pas faire une église en se fondant sur une constitution, mais agir avec foi d’après un principe qui embrasse toute l’Église de Dieu]

Voici ce que j’ai cru voir dans les voies de Dieu. Lorsque l’œuvre de l’Esprit en des chrétiens embrasse toute l’étendue des pensées de Dieu et toute l’énergie de puissance, elle réunit tous ses enfants. C’est ce qui a eu lieu au commencement. Si cela n’est pas, il faut que Dieu agisse ailleurs, parce qu’il ne peut pas abandonner les siens. Si l’énergie partielle veut se créer un système et des institutions formelles, elle devient secte. Dieu vous bénira, mes frères, dans votre fidélité. Je le crois, et je le désire de tout mon cœur. Je désire seulement qu’il y ait assez de largeur de cœur pour peser ce que je viens de vous dire, et qu’il y ait de la crainte de Dieu pour sentir combien il est sérieux de poser les fondements d’une Église telle qu’elle ait le droit de demander que tous y entrent. Si l’on en fait une autre que celle-là, on fait nécessairement une secte.

Si je me réunis avec deux ou trois enfants de Dieu, j’agis selon ma foi, et d’après un principe qui embrasse toute l’Église de Dieu, telle que Dieu la voit.

Si je jette les fondements d’une constitution, je fais une église. Et, dans ce cas, quelle est l’église que je fais ? Répond-elle entièrement à ce que Dieu a dit de son Église dans la Parole ?

En agissant selon ce qu’on a, Dieu donnera plus.

En établissant une église, je borne le cercle de mes bénédictions au mur d’enceinte que je me suis fait.

L’Apôtre dit : « Afin que vous compreniez, avec tous les saints, quelle est la largeur, la longueur, la hauteur et la profondeur, et que vous compreniez l’amour de Christ qui surpasse toute intelligence, afin que vous soyez remplis de toute la plénitude de Dieu. Or à Celui qui peut faire pour nous au-delà de tout ce que nous demandons, ou même pensons, selon sa puissance qui agit en nous, à Lui gloire dans l’Église, en toutes les générations du siècle des siècles ! Amen ».

Mes frères, je prie Dieu de tout mon cœur de vous bénir.

Cherchons la paix et le bien de son Église.